Un appel à la concertation ravivé
Réunis dans la capitale du 10 au 11 juillet 2025, les responsables de la Coordination nationale des réseaux et associations sur la gouvernance électorale et démocratique (Coraged) ont clos leurs travaux par une déclaration unanime : la tenue, avant mars 2026, d’une concertation nationale multipartenariale. Cette requête, portée par six organisations spécialisées dans la promotion des droits humains, de la culture de paix et de la gouvernance, s’inscrit dans la continuité des pratiques institutionnelles ayant jalonné la vie politique congolaise depuis le retour au multipartisme en 1992. « Notre objectif est clair : faire de la prochaine présidentielle un moment de consolidation et non de crispation », a résumé Céphas Germain Ewangui, secrétaire permanent du Conseil consultatif de la société civile.
Le rôle charnière de la société civile
Au-delà du simple plaidoyer, la démarche de la Coraged révèle la montée en puissance d’un tissu associatif aujourd’hui mieux structuré, bénéficiant de relais provinciaux et d’une expertise technique accrue. Selon un récent rapport interne, plus de 300 observateurs électoraux bénévoles pourraient être mobilisés, soit le double du contingent déployé lors des législatives de 2022. Cette dynamique, saluée par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), renforce la crédibilité de la société civile comme partenaire privilégié des pouvoirs publics dans la prévention des conflits électoraux. « Nous ne sommes pas dans une logique d’opposition mais de co-construction », insiste Mireille Okandza, coordinatrice du Réseau des femmes pour la démocratie, qui participe aux ateliers thématiques sur la médiation communautaire.
Une tradition de dialogue institutionnel
Depuis 2002, la convocation régulière par le président de la République de forums consultatifs avant chaque cycle électoral est devenue un marqueur de la gouvernance congolaise. Les participants y ajustent le calendrier, révisent les textes techniques et s’accordent sur les modalités de financement. Dans un contexte économique parfois contraint, cette approche graduelle a permis de maintenir la cadence des scrutins dans les délais constitutionnels. Plusieurs observateurs régionaux, dont l’Union africaine, soulignent que la stabilité institutionnelle demeure un atout pour le pays, propice aux investissements et à la coopération sous-régionale. En appelant à pérenniser cet espace de concertation, la Coraged se fait l’écho d’une pratique déjà éprouvée, qu’elle souhaite toutefois enrichir d’éléments nouveaux liés à la cybersécurité et à la lutte contre la désinformation.
Jeunesse et attentes démocratiques
Avec près de 60 % de la population âgée de moins de 25 ans, la présidentielle de 2026 se jouera aussi sur le terrain des aspirations d’une jeunesse connectée. Dans les campus de Brazzaville et de Pointe-Noire, les débats portent autant sur la transparence des listes électorales que sur l’accès à un premier emploi ou la transition numérique. « Notre génération veut des procédures claires, mais elle attend surtout des programmes concrets sur l’éducation et l’économie verte », observe Jules Ngoma, doctorant en sciences politiques à l’Université Marien-Ngouabi. Le ministère de la Jeunesse a d’ores et déjà annoncé une campagne de sensibilisation dédiée à l’inscription biométrique, soulignant la volonté des autorités de garantir une participation massive et sereine.
Enjeux logistiques et sécuritaires
Les défis purement techniques demeurent considérables : acheminement du matériel dans les zones enclavées, renforcement de la chaîne de compilation des résultats et formation continue des agents électoraux. Le Centre national de veille et d’alerte, créé en 2024, devrait être activé dès janvier prochain afin de centraliser les remontées d’information relatives à la sécurité des bureaux de vote. Pour la Coraged, il est impératif que « la liberté de mouvement des observateurs, la protection des journalistes et la neutralité des forces de l’ordre soient garanties sans faille ». Le gouvernement, de son côté, rappelle que « toutes les dispositions sont prises pour que chaque citoyen exerce son droit de suffrage dans la quiétude », selon les propos du porte-parole du ministère de l’Intérieur.
Vers une présidentielle apaisée
À mesure que s’égrènent les mois précédant le scrutin, les acteurs politiques multiplient les signaux d’ouverture. Plusieurs formations de l’opposition parlementaire ont salué l’idée d’une nouvelle concertation, y voyant l’occasion de clarifier les modalités d’accréditation et de financement de leurs représentants. Dans le même temps, des organisations confessionnelles proposent de mettre leur réseau communautaire au service d’une médiation proactive. « Nous sommes convaincus qu’un climat de confiance renforcé est la meilleure garantie contre les tensions post-électorales », affirme l’archevêque de Brazzaville lors d’une récente homélie dominicale.
Pour la jeunesse, principal baromètre de la vitalité citoyenne, la réussite du prochain rendez-vous électoral sera jugée à l’aune de la transparence et de l’innovation. Déjà, des start-ups locales testent des applications de suivi en temps réel des résultats provisoires, tandis que les radios communautaires planchent sur des formats interactifs de fact-checking. Dans cet écosystème en mutation, l’appel de la Coraged agit comme un catalyseur, rappelant que le dialogue reste un vecteur essentiel du progrès démocratique.
En filigrane, l’ensemble des parties prenantes convergent vers un même horizon : inscrire la présidentielle de 2026 dans la lignée des scrutins tenus dans les délais, respectueux de l’ordre constitutionnel et porteurs de cohésion sociale. À leur manière, associations citoyennes, institutions publiques et partenaires internationaux déroulent ainsi un fil conducteur que la formule de Céphas Germain Ewangui résume avec concision : « Lentement, mais sûrement, le Congo avance ». Le défi, désormais, consiste à transformer cette maxime en réalité tangible, du dépôt des candidatures jusqu’à la proclamation des résultats définitifs.