Une dynamique bilatérale relancée
Brazzaville s’est offert un moment de diplomatie parlementaire en plein août : au Palais des Congrès, le président du groupe d’amitié Congo-France, Aristide Ngama Ngakosso, a reçu l’ambassadrice Claire Bodonyi pour passer au crible le mémorandum signé cette année entre les deux Sénats.
Le document, signé à Paris au printemps, prévoit une coopération technique, culturelle et législative destinée à moderniser les pratiques et à rapprocher les citoyens des deux rives. La séance de travail a permis d’identifier les actions prioritaires à dérouler dès la prochaine session parlementaire.
Pour la diplomate française, il s’agit d’« approfondir la relation d’excellence qui unit nos pays », un message que son interlocuteur congolais partage volontiers, rappelant que le Sénat, chambre des collectivités, a vocation à répercuter sur le terrain chaque avancée obtenue à l’international.
Des priorités ancrées dans le quotidien
Trois dossiers sont sortis du lot : la transition énergétique, la politique migratoire et la lutte contre la désinformation. Chacun touche directement la jeunesse congolaise, qui voit dans l’énergie propre des débouchés professionnels, dans les migrations un horizon mobile et dans l’information un espace de liberté.
Au Sénat, plusieurs élus des plateaux estiment que « parler mobilité et climat sans écouter les jeunes serait une faute » ; d’où l’idée de séminaires mixtes associant start-ups congolaises et instituts français, afin d’accélérer le transfert de compétences plutôt que de multiplier les discours.
La diplomatie parlementaire entend également s’appuyer sur les collectivités locales. Il est envisagé de jumeler les départements du Niari ou des Plateaux avec des territoires ruraux français engagés dans la rénovation énergétique, histoire de tester, à petite échelle, des solutions solaires adaptées aux tropiques.
Transition énergétique : partage d’expertise
La France planche sur l’acceptabilité des éoliennes tandis que le Congo développe l’hydroélectricité du corridor du fleuve Congo. Les deux Sénats veulent comparer cadres juridiques et retours d’expérience pour éviter les erreurs et stimuler les investissements mixtes, notamment dans les mini-réseaux off-grid attendus par les zones enclavées.
Selon une note du ministère congolais de l’Énergie, les besoins nationaux grimperont de 7 % l’an jusqu’en 2030. Les sénateurs voient dans la coopération franco-congolaise un levier pour attirer des partenaires privés capables de financer des projets sobres en carbone et créateurs d’emplois stables.
Côté français, des sénateurs souhaitent visiter la centrale de Liouesso pour évaluer la possibilité d’un jumelage technologique. « Le succès du barrage nous apprend que l’Afrique centrale peut concilier souveraineté énergétique et respect du climat », souffle un conseiller en mobilité durable proche du dossier.
Migration : regards croisés
La question migratoire occupe les tribunaux autant que les réseaux sociaux. Paris dispose depuis 2023 d’un contrat d’intégration refondé ; Brazzaville, de son côté, finalise un nouveau code de la diaspora. L’idée est de comparer les textes pour fluidifier les allers-retours et prévenir les tensions.
Un atelier est programmé au Sénat de Brazzaville en novembre. Y participeront des élus d’Île-de-France, des entrepreneurs d’Oyo revenus au pays et des sociologues qui analyseront les récits migratoires. Objectif affiché : transformer les départs et retours en opportunités d’échanges économiques plutôt qu’en rupture sociale.
Pour plusieurs chercheurs, la clé réside dans des accords bilatéraux de formation. Les étudiants congolais pourraient effectuer des stages qualifiants en France avant de rentrer développer des infrastructures locales. Ce circuit gagnant-gagnant limiterait la fuite des cerveaux tout en alimentant les besoins français en compétences rares.
Désinformation : riposte concertée
Les équipes de communication des deux Sénats ont constaté une hausse de messages toxiques visant les symboles de l’amitié franco-congolaise. Les parlementaires craignent que ces contenus viraux nuisent à la perception des partenariats, surtout chez les moins de trente ans, très présents sur TikTok et X.
Un groupe de travail analysera les flux pour distinguer les critiques légitimes des manipulations orchestrées. Des formations seront proposées aux assistants parlementaires afin de répondre vite, chiffres à l’appui, aux narratifs fallacieux. « Notre meilleur allié reste la transparence », insiste un conseiller du président du Sénat.
Des journalistes congolais seront associés à l’exercice. Le pari est de créer un réseau de vérificateurs capables de collaborer avec les rédactions françaises. À terme, un portail commun publierait des démentis rapides, renforçant la confiance du public sans brider la liberté d’expression chère aux deux pays.
Prochaines étapes du mémorandum
D’ici la fin de l’année, trois missions croisées seront organisées, une par thème. Les conclusions nourriront un rapport conjoint remis aux présidents des deux Sénats avant la COP29. Ce calendrier serré illustre la volonté politique de transformer le mémorandum en résultats visibles pour la population.
Aristide Ngama Ngakosso l’assure : « Nous voulons prouver que les citoyens peuvent sentir l’impact d’un accord diplomatique dans leur quotidien ». Pour Claire Bodonyi, cet engagement pragmatique est la meilleure réponse aux doutes. Reste à concrétiser, dossier par dossier, une coopération annoncée exemplaire.
Les jeunes leaders, invités à chaque étape, disposeront ainsi d’une tribune pour proposer leurs innovations et suivre leur mise en œuvre.
