Alger accueille l’élite commerciale africaine
Du 4 au 10 septembre 2025, Alger se transformera en carrefour d’opportunités avec la quatrième Foire commerciale intra-africaine, connue sous l’acronyme IATF. Plus de 1 600 exposants et 35 000 visiteurs issus de 140 pays y sont annoncés.
Cet événement, créé en 2018, s’impose comme le plus grand rendez-vous économique du continent. Organisé par Afreximbank et l’Union africaine, il vise à faire passer le commerce intra-africain de 15 à 25 % d’ici 2030, selon les organisateurs.
ZLECAF : un moteur à consolider
Au cœur de la rencontre, la Zone de libre-échange continentale africaine sert de colonne vertébrale. Lancée en 2021, la ZLECAF ambitionne de créer un marché unique de 1,4 milliard d’habitants, générant un PIB combiné estimé à 3 000 milliards de dollars.
L’IATF d’Alger doit mettre en lumière les avantages tarifaires du dispositif et lever les doutes sur les procédures douanières. Les ateliers prévus réuniront responsables publics, logisticiens et start-up pour détailler les formulaires numériques unifiés en préparation à Addis-Abeba.
Une opportunité pour l’Algérie
Pour Alger, l’accueil de la foire offre une vitrine stratégique. « Nous voulons démontrer notre savoir-faire logistique et notre fiabilité comme porte d’entrée vers le Maghreb », avance un conseiller au ministère algérien du Commerce, joint par téléphone.
Le gouvernement espère capter une partie des 44 milliards de dollars d’accords commerciaux annoncés. Des zones industrielles spécialisées, notamment à Oran et Constantine, sont déjà promues pour recevoir de futurs investisseurs du textile, de l’agro-alimentaire et des énergies renouvelables.
Que gagne Brazzaville ?
Si l’événement se déroule à 3 000 kilomètres, les jeunes entrepreneurs congolais y trouvent un terrain fertile. La Chambre de commerce de Brazzaville vient d’annoncer un pavillon de vingt entreprises, sélectionnées pour présenter cacao, dérivés du manioc et solutions fintech.
Selon Arlette Ondongo, directrice du Centre congolais de promotion des exportations, « l’IATF sert de laboratoire grandeur nature. Nous voulons tester nos emballages, nos argumentaires et notre compliance aux normes africaines avant d’attaquer les marchés de l’Afrique de l’Ouest ».
La participation est soutenue par l’Agence congolaise pour l’entrepreneuriat des jeunes, qui finance 70 % des frais logistiques. Une enveloppe complémentaire du Fonds de développement industriel permet d’affréter un vol cargo spécial depuis Pointe-Noire.
Bilans et attentes chiffrées
Depuis son lancement, la foire a généré plus de 100 milliards de dollars d’accords. Les records établis au Caire en 2023 fixent la barre haut : 43 milliards conclus en sept jours, dont 15 % dans les services numériques.
Pour 2025, les prévisions tablent sur 44 milliards, soutenues par une croissance africaine estimée à 4 % par la BAD. Les analystes soulignent que la moitié des contrats devrait concerner l’infrastructure ferroviaire et le commerce électronique transfrontalier.
Logistique et diplomatie proactive
Alger a modernisé son Palais des expositions avec une connexion fibre de 100 gigabits pour les transactions en temps réel. Le port de Djen-Djen, à 350 kilomètres, propose désormais un guichet unique douanier afin de fluidifier l’acheminement des stands.
Sur le volet protocolaire, le ministère algérien des Affaires étrangères a déployé une cellule pour accélérer la délivrance des visas. La mesure vise à rassurer les visiteurs.
Un héritage panafricain revendiqué
La diplomatie algérienne rappelle qu’Alger fut, dans les années 1960, la tribune du panafricanisme. Le slogan « L’Afrique aux Africains », lancé lors d’une réunion de l’OUA en 1964, est régulièrement cité dans la communication officielle autour de l’IATF.
Pour le professeur ivoirien Kako Nubukpo, interviewé par la chaîne africaine TéléSud, « l’événement illustre la volonté du continent de ne plus exporter des matières brutes, mais de créer de la valeur localement ». Cette lecture rejoint la stratégie prônée par la ZLECAF.
Défis à surveiller
Malgré l’optimisme, plusieurs observateurs pointent la fragmentation des normes sanitaires et l’insuffisance des liaisons aériennes régionales. Les organisateurs répondront via un tableau de bord numérique, actualisé chaque trimestre, pour suivre les réformes engagées par les États membres.
Le suivi mettra l’accent sur la digitalisation des certificats d’origine et la réduction des frais de roaming, deux priorités identifiées lors du sommet de Kigali en 2022. Les jeunes pousses congolaises de la tech devront s’adapter pour rester compétitives.
Vers une édition record ?
Si les promesses se concrétisent, l’IATF 2025 pourrait servir de catalyseur au commerce sud-sud et stimuler la diversification congolaise prônée par les autorités de Brazzaville. Le rendez-vous d’Alger s’annonce déjà comme une étape déterminante du calendrier économique africain.
Innovation verte et inclusion financière
L’édition 2025 mettra un accent particulier sur la transition énergétique. Un hall entier sera dédié aux solutions solaires hors-réseau, aux batteries lithium-ion assemblées en Afrique et aux start-up travaillant sur la capture de CO2 agricole.
Des institutions financières, dont la Banque postale du Congo, projettent de lancer durant la foire un mécanisme de microcrédit panafricain. Les montants iront de 1 000 à 10 000 dollars, avec un taux préférentiel pour les entreprises gérées par des femmes.
Selon un rapport partagé par Afreximbank, l’accès au financement demeure l’obstacle numéro un pour 42 % des entrepreneurs africains. Les annonces attendues à Alger devraient donc façonner directement l’écosystème congolais au cours des trois prochaines années.