Une nouvelle voix pour l’enfance au Congo
Devant les drapeaux croisés de l’ONU et du Congo, Mariavittoria Ballotta a remis, cette semaine, sa lettre d’accréditation au ministre Jean Claude Gakosso. Le geste marque le début d’une mission déterminante pour l’Unicef et, surtout, pour des millions d’enfants.
La diplomate italienne succède à Chantal Umutoni, devenue, selon ses proches, l’une des voix les plus écoutées du plaidoyer pour l’enfance au pays. Ballotta entend « poursuivre l’élan et amplifier l’impact », a-t-elle déclaré, soulignant la dynamique constructive déjà engagée avec les autorités.
Un parcours forgé sur plusieurs continents
Formée à la London School of Economics, passée par le siège new-yorkais de l’Unicef, elle a dirigé la planification régionale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre depuis Dakar. Cette expérience lui a donné « une vue panoramique des réalités francophones », confie un collègue.
Elle a piloté des programmes d’éducation d’urgence au Sahel, négocié des couloirs humanitaires pendant Ebola en Sierra Leone et construit des alliances innovantes avec des start-up sénégalaises sur la data. Autant de briques qui l’aideront à naviguer dans l’écosystème congolais, réputé exigeant.
Des priorités alignées sur le Plan national de développement
Interrogée à Brazzaville, Ballotta insiste sur « la complémentarité entre le cadre global de l’Unicef et le Plan national de développement ». Ses axes prioritaires: nutrition, scolarisation des filles, accès à l’eau potable et renforcement des services de protection auprès des tribunaux pour enfants.
Ces priorités rejoignent les engagements pris par le gouvernement lors du Dialogue national pour l’enfance de 2022, où la malnutrition chronique avait été identifiée comme une urgence de santé publique. Avec 19 % de taux national, l’enjeu reste crucial pour atteindre les cibles 2030.
Coopération étroite avec Brazzaville et les départements
La représentante a déjà rencontré les ministres de la Santé, des Affaires sociales et de l’Enseignement primaire pour définir un calendrier commun. « Nous voulons des actions concrètes, mesurables et visibles dans les départements », résume un haut fonctionnaire, saluant la méthode participative de Ballotta.
Dans le Pool et la Likouala, deux zones jugées prioritaires, l’Unicef prévoit d’installer des centres mobiles de vaccination et un réseau d’eau chlorée pour les écoles rurales. Le ministère de l’Hydraulique apportera la logistique tandis que les autorités locales piloteront le suivi communautaire.
La jeunesse congolaise attendue au rendez-vous
Pour de nombreux jeunes congolais connectés, l’arrivée d’une nouvelle cheffe de file onusienne est aussi un signal. Sur X et Instagram, des influenceurs éducatifs réclament plus d’appui aux start-up EdTech nationales et la création d’espaces sûrs pour les filles en milieu urbain.
Ballotta affirme vouloir écouter cette génération: « Les innovations naissent souvent loin des bureaux climatisés ». Une série de hackathons par département est en discussion, afin de co-concevoir des solutions locales, de la cartographie participative des points d’eau à l’alerte SMS maltraitance.
Innovation, données et financement: le triptyque
L’experte mise sur l’analyse de données en temps réel pour orienter les politiques. Une plateforme de suivi de la nutrition, développée avec le Centre national de statistique, doit passer en phase pilote dès janvier. Les bailleurs saluent ce virage numérique, jugé gage de transparence.
Côté financement, l’Unicef entend diversifier ses partenaires en courtisant le secteur privé congolais. Selon la Chambre de commerce, trois acteurs agro-alimentaires auraient déjà promis un fonds de responsabilité sociétale dédié aux cantines scolaires, initiative que Ballotta qualifie de « cercle vertueux ».
Cap sur les objectifs de développement durable 2030
L’agenda s’inscrit dans la feuille de route des Objectifs de développement durable. Objectif 4 sur l’éducation, 6 sur l’eau ou 16 sur les institutions inclusives: autant de chantiers que l’Unicef co-pilote avec les ministères et le PNUD pour accélérer les indicateurs.
Brazzaville prépare d’ailleurs le Forum national des ODD prévu en juin. La présence active de l’Unicef à ce rendez-vous renforcera la mobilisation. « Nous devons communiquer davantage sur les progrès, sans occulter les défis », souligne un conseiller du ministère de l’Économie.
Le dialogue restera la clé du succès
La diplomatie humanitaire repose d’abord sur la confiance. Ballotta multiplie donc les immersions de terrain, visitant un centre pour enfants en situation de rue à Pointe-Noire puis un projet d’état civil numérique à Owando. Chaque déplacement nourrit son plaidoyer auprès des partenaires financiers.
En définitive, l’arrivée de Mariavittoria Ballotta marque une étape clé pour les droits de l’enfant au Congo. Entre ambition régionale et ancrage local, la nouvelle représentante promet de conjuguer innovation et pragmatisme. Les prochains mois diront jusqu’où cette promesse pourra être tenue.
Au-delà des indicateurs, Ballotta rappelle que « chaque statistique porte un visage ». Un rappel simple, humain, qui pourrait fédérer ministères, ONG et privés autour d’une même boussole: faire du Congo un modèle régional en matière de protection des générations futures.
