Un vote parlementaire révélateur d’une confiance macroéconomique
Le 25 juin 2025, l’hémicycle de Brazzaville a approuvé, à une large majorité, le financement de 70,6 millions d’euros proposé par le Groupe de la Banque mondiale dans le cadre de la troisième opération de soutien aux politiques de développement. En scellant ce partenariat financier, les députés ont validé un instrument alliant crédit IDA à taux concessionnel – 53,9 millions d’euros – et don – 16,7 millions d’euros –, témoignant d’une confiance accrue des bailleurs dans la trajectoire économique du pays.
Au-delà du seul montant, le caractère programmatique de cette enveloppe marque une étape qualitative : il ne s’agit plus de gérer l’urgence mais d’ancrer des réformes structurelles déjà amorcées depuis 2021. Plusieurs parlementaires ont souligné que la stabilité retrouvée des indicateurs macroéconomiques, après la double crise pétrolière et sanitaire, rend aujourd’hui crédible l’engagement d’une nouvelle phase de croissance inclusive.
La Banque mondiale, partenaire méthodique d’une croissance inclusive
Depuis une décennie, l’institution de Washington accompagne le Congo dans la consolidation de ses finances publiques. Selon le dernier rapport de la Banque mondiale, la stratégie DPF3 vise trois leviers : assainir les comptes de l’État, favoriser l’investissement privé non pétrolier et renforcer les filets sociaux. L’approche graduelle, saluée par les économistes locaux, conjugue conditionnalités souples et assistance technique ciblée, gage d’un transfert de compétences aux administrations congolaises.
Les experts interrogés à Brazzaville rappellent que les précédents décaissements DPF1 et DPF2 ont contribué à la modernisation de la chaîne de la dépense publique, en particulier grâce à la plateforme numérique e-Budget. L’actuelle tranche DPF3, jugée pivot, doit aller plus loin en consolidant la transparence des marchés publics et en stimulant la compétitivité des micro-entreprises portées par une jeunesse entrepreneuriale de plus en plus connectée.
Des indicateurs budgétaires en voie de rééquilibrage prudent
Les chiffres publiés par le ministère des Finances font apparaître un déficit budgétaire ramené à 1,8 % du PIB en 2024, contre 4,2 % en 2021. Cette amélioration découle d’une politique de rationalisation des subventions énergétiques et d’une amélioration sensible du recouvrement fiscal, portée par la dématérialisation des procédures douanières. Les recettes hors hydrocarbures ont augmenté de 23 % en deux ans, signal positif pour la résilience à long terme.
Le décaissement de la Banque mondiale renforcera les réserves de change et réduira le recours au financement monétaire, limitant ainsi la pression inflationniste qui oscille autour de 3,5 %. « La priorité reste de maintenir la discipline budgétaire tout en finançant des programmes sociaux à fort rendement », souligne un haut fonctionnaire du Trésor, confiant dans la capacité du gouvernement à conjuguer rigueur et équité.
Périmètres sociaux : jeunesse, emploi et innovation numérique
La tranche de don comprise dans le DPF3 sera en grande partie orientée vers le renforcement des dispositifs d’employabilité des 18-35 ans. Le programme Forsa, qui finance déjà des incubateurs à Pointe-Noire et Dolisie, bénéficiera d’un apport supplémentaire destiné à soutenir deux mille micro-projets dans les secteurs agro-industriels et créatifs. Cette stratégie vise à désamorcer la pression démographique sur le marché du travail tout en répondant aux aspirations d’une génération avide d’innovation.
L’écosystème numérique national, dopé par la généralisation de la fibre optique, se présente comme un relais de croissance non négligeable. Les partenariats public-privé encouragés par le ministère de l’Économie numérique facilitent l’implantation de plateformes de paiement mobile et l’exportation de services digitaux vers la CEMAC. Dans ce contexte, le financement de la Banque mondiale agit comme un catalyseur, offrant une marge de manœuvre budgétaire pour accompagner la mutation technologique.
Perspectives régionales et prudence face aux chocs exogènes
Inséré dans une sous-région encore tributaire des hydrocarbures, le Congo demeure exposé aux fluctuations des cours du brut. Les analystes soulignent toutefois que la diversification progressive de la matrice productive réduit la vulnérabilité aux chocs exogènes. Les exportations de bois transformé, de manganèse et de produits agro-alimentaires affichent une tendance haussière, contribuant à la solidité de la balance courante.
Les prévisions du Fonds monétaire international tablent sur une croissance réelle de 4,1 % en 2025, sous réserve de la poursuite des réformes. Pour sécuriser ces perspectives, le gouvernement a intensifié le dialogue économique avec ses partenaires régionaux afin d’harmoniser les politiques douanières et de fluidifier les corridors logistiques vers le port de Pointe-Noire, véritable porte océanique pour les pays de l’hinterland.
Gouvernance proactive et dynamique de transparence budgétaire
La signature récente du Code de conduite sur la gestion de la dette publique, inspiré des meilleures pratiques internationales, illustre la volonté des autorités de renforcer la confiance des citoyens et des investisseurs. Le ministère des Finances publie désormais, chaque trimestre, un bulletin statistique détaillant l’encours de la dette et la structure des créanciers, pratique saluée par la société civile et les chambres consulaires.
Cette transparence nouvelle facilite l’optimisation du portefeuille de projets, en orientant les ressources vers les infrastructures à fort impact, notamment l’électrification rurale et la réhabilitation des routes secondaires. Dans cette séquence, la Banque mondiale agit comme un partenaire technique, mais la souveraineté des choix stratégiques demeure pleinement entre les mains des institutions nationales, comme l’a rappelé le président de l’Assemblée lors des débats.
Cap sur 2030 : convergence des réformes et ambitions vertes
À l’horizon 2030, le Congo ambitionne d’atteindre une croissance diversifiée, inclusive et sobre en carbone. Le Plan national de développement 2022-2026, désormais articulé avec la Vision 2030, met l’accent sur la valorisation durable des forêts du bassin du Congo, poumon écologique mondial. Le financement DPF3 inscrira des critères environnementaux dans la sélection des projets, conformément à l’Accord de Paris.
Les partenaires techniques estiment que la transition vers une économie verte pourrait générer près de quatre-vingt mille emplois dans les filières du bois certifié, de l’écotourisme et de la transformation agro-écologique. En dotant l’État de marges budgétaires, la Banque mondiale participe à créer les conditions d’une modernisation harmonieuse, où croissance économique, cohésion sociale et préservation de l’environnement convergent dans un même horizon de prospérité partagée.
