Lumière crue sur la détresse des migrants subsahariens en Tunisie
Les images recueillies par un collectif de documentaristes, projetées la semaine dernière à Paris, ont brutalement rappelé que la route méditerranéenne n’est pas le seul théâtre de souffrances pour les migrants. Dans le sud tunisien, aux confins de la Libye et de l’Algérie, des groupes entiers d’Africains subsahariens, dont des Congolais, sont repoussés hors des villes, abandonnés dans des plaines caillouteuses où la température dépasse souvent quarante degrés. Privés d’eau et de vivres, ils organisent des campements de fortune et attendent un improbable secours des ONG locales.
Un jeune étudiant en sciences économiques, rapatrié récemment à Pointe-Noire, confie : « Les autorités locales nous poussaient vers le sable, la nuit, sans un bidon d’eau ». Le témoignage, sobre mais incisif, illustre un système de dissuasion migratoire qui se durcit depuis 2023 à la suite de déclarations politiquement sensibles sur la « démographie étrangère ». Si la diplomatie congolaise suit le dossier avec attention, l’assistance d’urgence reste essentiellement assurée par le Croissant-Rouge et quelques associations citoyennes.
Dédale juridique et diplomatique : les ressortissants congolais face au défi migratoire
Pour nombre de Congolais, la Tunisie représente historiquement une escale plutôt qu’une destination finale. Or, la multiplication des arrestations au large de Sfax ou de Djerba contraint les voyageurs à un dangereux jeu de cache-cache avec des forces de sécurité sous pression. Selon les chiffres recoupés par des organisations humanitaires, près d’un millier de ressortissants d’Afrique centrale seraient passés par les centres de rétention tunisiens depuis janvier. Le contexte international, marqué par une surveillance maritime renforcée, complexifie les voies de sortie légales.
Les services consulaires de Brazzaville insistent sur la « prévention » et la « conscience des risques ». À l’aéroport Maya-Maya, des brochures mises à disposition du public détaillent les arnaques aux visas, les dangers des passeurs et les instruments de rapatriement volontaire. Cette stratégie d’information, saluée par plusieurs partenaires multilatéraux, vise à réduire les départs imprudents sans pour autant brider la mobilité étudiante ou professionnelle légitime.
La tragédie de Bangui et ses résonances régionales sur la sécurité scolaire
À plus de deux mille kilomètres de là, le cœur de la jeunesse africaine s’est serré devant les images d’un lycée de Bangui transformé en scène de chaos. L’explosion d’une grenade artisanale, déclenchée par mégarde, a provoqué une bousculade meurtrière qui a coûté la vie à vingt-neuf élèves selon le dernier bilan officiel. Dans un contexte sécuritaire déjà fragile, l’accident soulève la question de la circulation des explosifs dans les zones urbaines et de la protection des infrastructures éducatives.
Des experts en gestion des risques scolaires rappellent que la prévention passe par un contrôle renforcé des abords des établissements, une éducation à la non-violence et une coordination étroite entre forces de l’ordre et autorités académiques. À Brazzaville, le ministère de l’Enseignement général a immédiatement réévalué ses protocoles en matière de secours et d’évacuation, afin d’éviter la reproduction de tels drames.
Semia Gharbi, la voix verte qui refuse de se taire
Au milieu de ce cortège de mauvaises nouvelles, la reconnaissance attribuée à Semia Gharbi, éducatrice scientifique tunisienne, rappelle la puissance de l’engagement individuel. La lauréate du prestigieux Goldman Environmental Prize a démantelé, au terme de plusieurs années d’enquête participative, un trafic transfrontalier de déchets toxiques maquillé en recyclage. Son approche, mêlant vulgarisation scientifique et action citoyenne, a inspiré nombre de jeunes Africains, y compris dans les campus de Kinshasa et de Brazzaville.
En recevant son prix, elle a déclaré : « Lorsque la connaissance devient accessible, l’injustice environnementale recule ». Son message résonne particulièrement sur les rives du fleuve Congo, où la gestion durable des déchets urbains demeure un chantier prioritaire. Les municipalités qui ont amorcé des programmes de tri sélectif soulignent le rôle moteur d’une jeunesse instruite, informée et déterminée à ne pas externaliser la pollution.
Responsabilités partagées et pistes d’action pour la jeunesse d’Afrique centrale
Qu’il s’agisse d’errance migratoire, de sécurité scolaire ou de justice environnementale, un fil rouge traverse ces trois actualités : la jeunesse du continent se trouve simultanément victime et actrice des mutations en cours. Les gouvernements, dont celui du Congo, multiplient les partenariats pour consolider les filets de protection tout en encourageant la mobilité qualifiée, la scolarité sécurisée et l’entrepreneuriat vert.
Les organisations étudiantes rappellent que l’information est la première ligne de défense. Se former, s’impliquer dans les plateformes de veille citoyenne et soutenir les initiatives locales crédibles constituent autant de leviers capables de transformer l’indignation en action constructive. À l’échelle individuelle, vérifier la légalité d’un projet migratoire, signaler la présence d’engins suspects aux abords d’une école ou participer à une collecte de plastiques sont des gestes simples qui, agrégés, dessinent une Afrique centrale plus résiliente.
À l’heure où les projecteurs médiatiques se braquent souvent sur les crises, cette responsabilité partagée offre un horizon : celui d’une génération qui, consciente des périls, choisit néanmoins l’espoir raisonné plutôt que la résignation.