L’élan brazzavillois du tennis de table sous-régional
Dans l’atmosphère moite de la salle Henri-Elende, la petite balle blanche a frappé plus fort que les vuvuzelas. Durant trois jours, Brazzaville a accueilli la Zone IV d’Afrique centrale, rendez-vous décisif pour déterminer les représentants de la sous-région au prochain championnat d’Afrique, programmé en octobre à Kigali. Les délégations de la République démocratique du Congo, du Cameroun et de la République du Congo, mieux préparées, ont glané les médailles et, dans leur sillage, le précieux sésame. Les scores serrés, l’intensité des échanges et la discipline tactique ont confirmé la montée en gamme technique d’un tennis de table encore trop discret dans l’imaginaire sportif du continent.
Des raquettes comme passerelles de cohésion juvénile
Si le football occupe traditionnellement le devant de la scène, la performance des pongistes rappelle qu’une discipline individuelle peut aussi fédérer espoirs et fiertés nationales. « Lors d’un championnat comme celui-ci, nous ramenons des médailles que le football nous refuse parfois », a souligné Didier Ngoma, président de la Fédération de tennis de table de la RDC, sous les applaudissements de supporters jeunes, curieux d’un sport qu’ils redécouvrent. Pour nombre d’étudiants présents, la raquette devient prétexte à une diplomatie populaire : sur les gradins, codes vestimentaires urbains, hashtags et discussions animées sur les réseaux sociaux se mêlaient aux encouragements. La compétition a offert à la jeunesse congolaise un miroir inédit, où l’effort individuel se conjugue à la réussite collective.
Une logistique à affûter pour transformer l’essai
La lumière des projecteurs n’a toutefois pas occulté les réalités logistiques. Serge Irénée Samba, directeur technique national de la Fédération congolaise, a rappelé que « certains athlètes ont vu leur préparation perturbée faute de passeport délivré dans les temps ». Les défis administratifs, auxquels s’ajoutent l’entretien des tables homologuées, le renouvellement des revêtements et la nécessité de stages de haut niveau, restent entiers. Les fédérations concernées plaident pour un accompagnement méticuleux des ministères de tutelle, conscient que la route de Kigali exige plus qu’un simple billet d’avion : il faut des séances techniques soutenues, un suivi nutritionnel scrupuleux et un encadrement psychologique pour résister à la pression continentale.
Kigali en ligne de mire, ambitions et responsabilités partagées
Au-delà de la qualification, l’objectif est de franchir un cap dans la hiérarchie africaine. La capitale rwandaise, auréolée d’une organisation sportive désormais reconnue, offrira des conditions propices à la haute performance. Les trois délégations savent que la concurrence nord-africaine sera redoutable, mais elles entendent capitaliser sur l’atout de la fraîcheur juvénile. Le Camerounais Boris Ekani, vainqueur en simple messieurs, affirme viser « un quart de finale minimum », tandis que la Congolaise Prisca Oba reconnaît « travailler l’endurance pour tenir les échanges à grande vitesse ». Les staffs techniques planchent déjà sur des plans d’adaptation à l’altitude modérée de Kigali, misant sur des stages en province pour simuler des conditions comparables.
Au-delà du podium, un héritage sportif pour la génération montante
Les observateurs s’accordent à dire que l’élan suscité par le tennis de table dans la sous-région possède un potentiel d’entraînement bien au-delà de la compétition. Il nourrit l’idée d’une économie sportive diversifiée, véritable gisement d’emplois pour les jeunes : entraîneurs, arbitres certifiés, fabricants de matériel et créateurs de contenus digitaux. Le ministère congolais des Sports, engagé dans la mise en œuvre du Plan national de développement, voit dans cet engouement une opportunité de renforcer la cohésion sociale et d’encourager un mode de vie sain. La route vers Kigali, jalonnée d’efforts collectifs, pourrait ainsi laisser une empreinte durable dans les quartiers de Brazzaville et de Kinshasa, où chaque table installée devient un laboratoire de discipline, d’audace et d’ouverture sur le monde.
