Brazzaville sert le coup d’envoi continental
L’air sent la poudre de magnésie dans le gymnase Henri-Elendé. Depuis le 29 septembre, Brazzaville vit au rythme du premier championnat d’Afrique des nations de volleyball zone 4, un format compact imaginé par la Confédération africaine pour réveiller une région longtemps restée en retrait.
Quatre jours de matches intenses et surtout des points précieux pour le classement mondial figurent au programme. Le ministère congolais des Sports mise sur l’événement pour montrer la capacité du pays à accueillir des compétitions d’envergure et attirer de futurs tournois internationaux.
Un plateau réduit, mais des histoires à raconter
Le plateau n’est pas complet mais il reste relevé: Cameroun, République centrafricaine et Congo chez les hommes; Cameroun et Congo chez les dames. Les contraintes logistiques et budgétaires expliquent plusieurs forfaits, admet un membre du comité d’organisation rencontré dans les couloirs du complexe.
«L’important est de lancer la machine», souligne Jean-Claude Kibangou, directeur technique national. Il rappelle qu’en 1965, Brazzaville avait déjà marqué l’histoire africaine avec les premiers Jeux. Pour lui, ce nouveau pari servira de tremplin aux fédédérations de la sous-région.
Les Lionnes indomptables au filet
Côté féminin, la hiérarchie s’est vite dessinée: le Cameroun, double champion d’Afrique, a déroulé sans laisser un set aux Congolaises lors des deux premières rencontres, gagnées 3-0, mettant quasiment fin au suspense avant la dernière opposition du 2 octobre.
La réception camerounaise n’a jamais vacillé tandis que les attaques de Laetitia Moma faisaient mouche. «Nous voulons garder notre standing continental», glisse la capitaine Christelle Nana, lunettes de repos sur le nez, souriante malgré la chaleur du gymnase.
Dans le camp congolais, on retient les signes encourageants. La jeune passeuse Grâce Ndinga insiste sur l’apprentissage en cours. «Nos supporters nous portent, nous voulons au moins leur offrir un set», promet-elle, visiblement déterminée à transformer l’expérience en carburant pour l’avenir.
Les Diables rouges rêvent de finale masculine
Chez les hommes, tout reste possible. Le Congo a lancé son tournoi par une victoire expéditive 3-0 sur la République centrafricaine, porté par les 2,08 m du pointu Armel Mabiala et les chants d’un public bouillant malgré la canicule brazzavilloise.
Le choc attendu contre le Cameroun se joue le 1er octobre. Voisins et rivaux, les deux pays veulent se jauger avant une finale probable. «On promet un spectacle total», lance le central camerounais Cédric Tatchou à la sortie de l’échauffement.
Le format prévoit que les deux premiers du mini-championnat s’affrontent à nouveau en finale le 2 octobre. Le staff congolais gère donc les rotations pour préserver les épaules de son capitaine Marvin Mvoula, rentré récemment d’une exigeante saison en Ligue A française.
Coulisses d’une organisation express
Organiser un rendez-vous continental en six mois relève du sprint. Les bénévoles, reconnaissables à leurs t-shirts rouges, filent entre table de marque, loge des officiels et tribune presse. «On dort peu, mais on apprend», sourit Mireille, étudiante en communication mobilisée pour l’occasion.
L’État a dégagé un budget serré, misant sur des partenariats avec des entreprises locales pour restaurer et transporter les délégations. La gratuité des billets séduit les internautes, stratégie assumée pour remplir les gradins et créer l’ambiance virale recherchée sur TikTok et Instagram.
La Confédération africaine, satisfaite du protocole sanitaire, en profite pour animer un séminaire d’entraîneurs axé sur la vidéo-analyse. Objectif: transformer la passion locale en performances mesurées et rapprocher la zone 4 des standards internationaux avant les prochaines qualifications olympiques.
Impact social et ambitions futures
Au-delà des points, le tournoi sert de vitrine à la jeunesse sportive congolaise. Les influenceurs multiplient les reels au bord du terrain, capturant les envolées et les célébrations chorégraphiées. «Ça change des contenus habituels et montre le talent d’ici», apprécie la créatrice NyotaMike.
Les commerçants de Poto-Poto profitent aussi de l’affluence. Les vendeuses de beignets affirment avoir doublé leurs ventes, selon un micro-trottoir improvisé. Le volley crée une petite économie éphémère et pousse la municipalité à envisager un tournoi féminin U-18 en avril prochain.
Sportivement, le directeur de la zone 4, Joseph Mahop, rêve d’un circuit annuel avec des étapes à Bangui, Yaoundé et Brazzaville. «Si nous voulons exister au niveau mondial, il faut jouer plus», insiste-t-il, appelant les fédérations à mutualiser leurs ressources.
En attendant, le public brazzavillois savoure chaque smash. Finale féminine sans enjeu ou blockbuster masculin, l’essentiel reste de prouver que le centre du continent peut tenir le filet haut et rêver d’or, sous les projecteurs d’un gymnase devenu poumon sportif.