Une société civile en éveil
Réunis les 10 et 11 juillet 2025 à la Maison de la société civile de Brazzaville, les responsables des six réseaux et organisations membres de la Coraged ont donné le ton : la prochaine étape décisive sur la route de l’élection présidentielle devrait passer par une concertation nationale. Selon Céphas Germain Ewangui, secrétaire permanent du Conseil consultatif de la société civile, « lentement et sûrement, notre pays poursuit sa marche vers la consolidation démocratique ». Par cette déclaration programmée, les ONG affirment leur volonté d’inscrire le débat électoral dans un cadre serein, participatif et transparent, sans pour autant remettre en cause la légitimité des institutions existantes.
Cette posture reflète l’évolution d’une société civile longtemps cantonnée à la sensibilisation mais désormais reconnue comme partenaire consultatif du pouvoir exécutif. En valorisant le dialogue plutôt que la confrontation, la Coraged occupe un terrain intermédiaire qui rassure les citoyens, notamment les jeunes électeurs, tout en rappelant aux acteurs étatiques leurs obligations constitutionnelles : sécurité, libertés publiques et presse libre, piliers non négociables d’une compétition loyale.
L’historique des consultations électorales récentes
Depuis la Constitution de 2002, le calendrier électoral est respecté malgré un contexte budgétaire souvent contraint. Qu’il s’agisse des législatives de 2017 ou des locales et sénatoriales de 2022, les scrutins se sont déroulés aux dates prévues, précédés d’échanges avec les forces vives. Cette régularité, saluée par plusieurs observateurs régionaux, a contribué à ancrer l’idée que la stabilité institutionnelle est un acquis collectif et non une concession ponctuelle. La convocation, par le président de la République, de rencontres préalables constitue désormais un rite politique inscrit dans les pratiques.
Les recommandations issues des forums tenus en 2013 et 2016, notamment sur la modernisation de la Commission nationale électorale indépendante, ont servi de fondement aux innovations techniques récentes : fiabilisation du fichier, équipements biométriques et diversification des observateurs. Pour la Coraged, la prochaine consultation doit capitaliser sur ces avancées afin de dissiper les appréhensions qui entourent régulièrement les présidentielles et de transformer l’exercice démocratique en tremplin de cohésion.
La jeunesse comme vigie citoyenne
Avec près de 60 % de la population âgée de moins de 35 ans, le Congo-Brazzaville voit émerger une génération interconnectée, avide de transparence et peu disposée à revivre les crispations électorales du passé. Les associations étudiantes et les incubateurs numériques ont accueilli positivement l’appel à la concertation, estimant qu’un espace d’échanges formalisé faciliterait la vulgarisation des règles du jeu et l’intégration d’outils digitaux pour le suivi des opérations de vote.
Clémentine M., initiatrice d’une plate-forme d’éducation civique, souligne que « la légitimité d’un scrutin se mesure autant par la sincérité des bulletins que par la perception de justice qui l’entoure ». Pour de nombreux jeunes professionnels, la séance de dialogue envisagée pourrait être l’occasion d’institutionnaliser des observatoires citoyens, renforçant la chaîne de confiance entre électeurs, candidats et administration.
Les garanties institutionnelles évoquées
Dans leur déclaration finale, les membres de la Coraged saluent les efforts déjà consentis par l’État, rappelant que « depuis 2002, l’État congolais ne ménage aucun effort pour tenir, dans les délais, l’ensemble des consultations électorales ». Ils recommandent toutefois un recentrage sur trois axes : clarification des modalités de financement des campagnes, accessibilité médiatique équitable et sécurisation physique des bureaux de vote. Ces propositions prolongent les engagements pris par le gouvernement lors de la dernière adresse à la Nation, où la modernisation de l’administration territoriale a été érigée en priorité.
Du côté de l’exécutif, l’on réaffirme la disponibilité à entendre toutes les sensibilités. Un conseiller du ministère de l’Administration du territoire confie que « la concertation est un outil, non une contestation ; elle permet de calibrer nos dispositifs pour que les résultats reflètent la volonté populaire ». Cette convergence rhétorique entre État et société civile laisse présager un processus inclusif, conforme aux standards de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale, souvent sollicitée en qualité de témoin.
Regards croisés sur un futur apaisé
Si l’appel de la Coraged ne constitue pas une rupture, il inaugure un nouveau cycle où la participation citoyenne se conjugue à la responsabilité institutionnelle. En filigrane, l’objectif partagé est d’éviter que l’échéance de mars 2026 ne soit perçue comme une parenthèse tumultueuse mais plutôt comme une étape supplémentaire dans l’enracinement démocratique. Les politologues de l’Université Marien-Ngouabi notent que l’alliance pragmatique entre ONG et pouvoirs publics pourrait convaincre les partenaires internationaux de l’engagement congolais envers la gouvernance inclusive.
À mesure que le compte à rebours électoral s’égrène, l’attention se porte donc sur la capacité des acteurs à transformer l’intention de concertation en plateforme structurée, dotée d’un calendrier clair et de mécanismes de suivi. Pour la jeunesse, la promesse est double : garantir la paix sociale et offrir un environnement politique propice aux initiatives économiques. À l’horizon 2026, la balle est désormais dans le camp de tous les citoyens, appelés à conjuguer leurs attentes avec les instruments légaux disponibles afin de hisser l’exercice démocratique au rang de vecteur de développement.