Cap sur l’Open de Beijing
Du 10 au 16 novembre, Beijing transformera son complexe sportif en temple de la gymnastique rythmique avec l’Open international et la Coupe Sky. Pour la première fois, le drapeau congolais flottera grâce à deux jeunes athlètes enthousiastes.
Davina Nkenko Sita, 10 ans, et Céleste Malanda Mayinga, 20 ans, ont gagné leurs billets après des performances nationales éclatantes. Leur sélection symbolise la prise de vitesse de la Fédération congolaise de gymnastique, désireuse d’exister au-delà des frontières continentales.
Un stage intensif à Sotchi
Parties de Brazzaville le 18 octobre, les deux gymnastes ont posé leurs valises à Sotchi pour trois semaines d’entraînement auprès de techniciens russes réputés. La station balnéaire, héritage des Jeux 2014, offre tapis connectés, miroirs géants et salles hyperbarres.
« Sky Grâce est la plus grande académie au monde, tout respire la haute performance », confie Céleste entre deux assouplissements. Le programme, inspiré des méthodes soviétiques, prévoit six heures par jour d’expression corporelle, de travail du ruban et de renforcement musculaire.
Davina et Céleste, profils prometteurs
Davina a à peine quitté l’école primaire qu’elle aligne déjà un palmarès de médailles nationales, la dernière remportée le 28 septembre lors du tournoi de reconnaissance Alina Kabaeva. Sa souplesse naturelle et son charisme lui valent le surnom de « petite panthère de Moungali ».
Céleste, étudiante en management sportif, s’est illustrée aux Jeux de la Zone IV l’an dernier à Luanda avec une cinquième place encourageante. Son point fort reste la corde, où elle réalise un saut-piqué noté 9,1 par les juges, un record personnel qu’elle souhaite améliorer à Beijing.
La fondation Sky Grâce, alliée précieuse
Derrière l’initiative se tient la championne olympique Alina Kabaeva. Par sa Fondation Sky Grâce, l’icône russe finance stages, tenues et billets d’avion. « Ouvrir la discipline à l’Afrique est ma façon de rendre au sport ce qu’il m’a donné », insiste-t-elle.
Le consul honoraire du Congo à Saint-Pétersbourg, Jocelyn Patrick Mandzela, s’investit aussi via la Fondation Africa Centrum. Son réseau facilite les visas et les partenariats techniques. Pour la fédération, cette synergie diplomatique illustre l’intérêt grandissant que suscite la jeunesse sportive congolaise à l’étranger.
Une discipline en plein essor au Congo
Longtemps dominée par le football et l’athlétisme, la scène sportive nationale voit naître de nouvelles passions. Depuis 2019, huit clubs de gymnastique rythmique ont ouvert à Brazzaville et Pointe-Noire. Les inscriptions flambent chez les adolescentes, séduites par l’esthétique du ruban et les vidéos TikTok.
Le ministère des Sports a livré deux plateaux modulables au gymnase Henri-Elendé, offrant enfin des conditions proches des standards internationaux. Une enveloppe logistique validée en conseil des ministres couvrira les déplacements des sélections, du continent africain jusqu’en Asie.
Objectifs et rêves de podium
Pour leur première sortie mondiale, l’objectif officiel reste modeste: intégrer le top vingt et engranger de l’expérience. Pourtant, dans les couloirs, les coachs murmurent qu’une finale par agrès est envisageable. « Sans chute, Davina peut surprendre », glisse l’entraîneuse Ioulia Kuznetsova.
La fédération espère que cette visibilité débouchera sur des partenariats commerciaux; un contrat équipementier est déjà en discussion. Pour les supporters, l’événement sera diffusé sur une plateforme mobile, une première qui devrait doper les audiences jeunes en quête de contenus interactifs.
À moyen terme, l’ambition est de présenter une équipe complète aux Jeux Africains de 2027 puis aux qualifications olympiques. Davina rêve d’y croiser son idole Margarita Mamun, tandis que Céleste imagine un spectacle géant au Palais des congrès de Brazzaville pour populariser la discipline.
En attendant, les deux pépites peaufinent leurs enchaînements sous la lumière rose des salles de Sotchi. Chaque pirouette filmée finit sur Instagram, où les commentaires d’encouragement affluent. Leur aventure incarne l’énergie d’une jeunesse congolaise qui refuse de se fixer des limites géographiques.
Le rôle des réseaux sociaux
Depuis Brazzaville, un challenge #RhythmicCongo a été lancé sur TikTok: reproduire le pivot de Davina en trente secondes. La vidéo originale cumule déjà 200 000 vues. La fédération promet d’envoyer un maillot officiel à la création la plus créative.
« Les réseaux sont notre premier stade », reconnaît le community manager de l’équipe, Delvis Opango. Grâce à des lives hebdomadaires, il collecte en temps réel des conseils techniques envoyés par des anciens gymnastes de la diaspora basés à Paris, Montréal ou Johannesburg.
Logistique et protocole sanitaire
À Beijing, la délégation logera dans la bulle sportive de Haidian, avec tests PCR toutes les 48 heures. L’association des étudiants congolais de Tsinghua assurera la cuisine africaine, servant saka-saka et bananes plantain aux athlètes.
Ce que cela change pour le sport féminin
La participation à l’Open sert aussi de levier pour l’égalité des chances. Le Centre national d’éducation physique prévoit d’intégrer davantage de créneaux féminins dans son futur complexe de Kintélé, dont l’ouverture est programmée pour 2025.
Pour la sociologue Mireille Ofoungou, cette visibilité brise plusieurs stéréotypes: « La gymnastique rythmique montre que force et grâce peuvent coexister. Voir des Congolaises évoluer à Beijing inspire les jeunes filles à occuper l’espace sportif sans complexe ».