Un verdict qui résonne dans le département de la Likouala
Le 26 juin 2025, le Tribunal de Grande Instance d’Impfondo a rendu une décision qui fait désormais date dans la jurisprudence environnementale congolaise. Trois ressortissants nationaux, Jodel Mouandola, Arel Ebouzi et Parfait Mbekele, ont été respectivement condamnés à trois ans et deux ans d’emprisonnement ferme, assortis d’une amende solidaire d’un million de francs CFA et de trois millions de francs CFA de dommages et intérêts. « La loi doit être un bouclier pour notre capital naturel », a expliqué le substitut du procureur lors de l’énoncé du jugement, insistant sur l’exemplarité de la peine face à l’ampleur des atteintes constatées.
Chronique d’une filière illicite stoppée net
Tout débute le 27 mai 2025 au marché principal d’Impfondo, où Jodel Mouandola et Arel Ebouzi sont interpellés en possession d’une peau de panthère ainsi que d’écailles et griffes de pangolin géant. L’enquête de voisinage révèle rapidement le rôle central de Parfait Mbekele, cueilli quelques heures plus tard à Épéna-Centre. Selon le rapport d’audition, les trois hommes reconnaissent avoir voulu écouler leurs trophées vers la frontière fluviale, profitant de l’entrelacs de cours d’eau qui sillonnent la Likouala. Ce point logistique, longtemps réputé poreux, démontre la nécessité d’une vigilance permanente sur l’ensemble du territoire.
La mécanique institutionnelle derrière l’opération conjointe
L’action coordonnée de la gendarmerie, de la Direction départementale de l’Économie forestière et du Projet d’appui à l’Application de la Loi sur la Faune sauvage illustre la solidité du dispositif étatique. « Nous parlons d’une chaîne de commandement fluide où chaque maillon – des patrouilles fluviales aux techniciens vétérinaires – apporte son expertise », souligne un officier supérieur de la gendarmerie. Cette synergie opérationnelle, encouragée par le ministère de l’Économie forestière, consolide la réputation du Congo-Brazzaville comme acteur régional engagé dans la préservation des espèces emblématiques d’Afrique centrale.
Une portée pédagogique assumée par les magistrats
Au-delà de la sanction pénale, le tribunal entend envoyer un message clair aux filières criminelles : les ressources fauniques ne sauraient être une variable d’ajustement économique. Le juge président a rappelé que le pangolin géant et la panthère figurent à l’annexe I de la Convention de Washington, tout en invoquant la loi n° 37-2008, dont l’article 27 place ces espèces sous une protection intégrale. Dans le public, composé en grande partie d’étudiants en droit et en biologie, certains ont salué « un acte didactique puissant » susceptible d’inspirer d’autres juridictions de la sous-région.
Une biodiversité au cœur de la diplomatie verte congolaise
La République du Congo s’est fixé pour cap de faire de sa richesse écologique un levier diplomatique et économique, à travers la valorisation des forêts, des tourbières et d’une faune unique. Le ministère des Affaires étrangères ne cesse de souligner que la lutte contre la criminalité faunique participe à la crédibilité des engagements internationaux pris à la COP26 et lors des Sommets des Trois Bassins forestiers. En assurant le respect strict de ses textes, l’État conforte ainsi sa position de partenaire fiable pour les programmes de financement climatique.
Jeunesse congolaise : entre vigilance citoyenne et perspectives économiques
Pour nombre de jeunes adultes de la Likouala, la tentation du gain rapide liée au commerce clandestin peut paraître séduisante. Or, les initiatives de l’Agence nationale de l’emploi vert, qui promeut l’écotourisme communautaire et la transformation durable des produits forestiers non ligneux, offrent des alternatives concrètes. « Rien n’interdit de gagner sa vie dans la forêt, encore faut-il que cela se fasse dans le respect du vivant », insiste un entrepreneur social basé à Impfondo, dont la coopérative emploie vingt-cinq jeunes issus de villages riverains.
Perspectives pour une économie verte locale
La sentence d’Impfondo ouvre une séquence nouvelle où la justice, la société civile et le secteur privé sont appelés à fusionner leurs efforts afin de transformer un risque écologique en opportunité de développement. Déjà, un projet pilote visant à former des éco-gardiens communautaires est à l’étude, avec le soutien de partenaires techniques internationaux. Si elle se confirme, cette dynamique placera la Likouala à l’avant-garde d’un modèle où la protection de la faune rime avec résilience socio-économique, un horizon auquel aspire toute une génération soucieuse d’ancrer son avenir dans la durabilité.