Une rencontre panafricaine au cœur de Brazzaville
Sur l’Allée piétonne Charles-Ebina, un samedi soir tiède d’août, les drapeaux des deux Congo flottaient côte à côte. Entre musique douce et applaudissements, Jonathan Lumbeya Masuta, président du FIJADA, ouvrait une rencontre destinée à faire rayonner les résolutions adoptées récemment à Kinshasa.
La scène, supervisée par l’ancien député José Cyr Ebina, mêlait représentants du Conseil consultatif de la jeunesse, acteurs onusiens et associations locales triées sur le volet. Tous partageaient un objectif commun : donner corps aux ambitions vertes, sociales et économiques portées par la table-ronde du 12 août.
Dans ce décor urbain, Daniel Biangoud a reçu son trophée de représentant national du FIJADA. L’image, rapidement relayée sur les réseaux sociaux, symbolise l’ancrage croissant du mouvement en République du Congo et l’envie des jeunes de participer plus activement aux politiques publiques de développement.
Les conclusions vertes de Kinshasa
Devant l’audience, l’ambassadrice Deborah Bowa Baïke a déroulé les points clés discutés à Kinshasa. Le maître-mot est durabilité : renforcer l’éducation environnementale, encourager l’entrepreneuriat écologique et faciliter l’accès aux technologies vertes pour que l’Afrique réponde à la crise climatique sans sacrifier sa croissance.
Elle a rappelé qu’une jeunesse outillée peut transformer la gestion des déchets, inventer des start-up d’énergie solaire ou réhabiliter des mangroves, citant les expériences pilotes de Matadi et Pointe-Noire. « Nous voulons bâtir un continent où la croissance rime avec circularité », a-t-elle résumé.
Le rapport évoque aussi la nécessité d’intégrer pleinement les jeunes dans les cercles décisionnels nationaux. Selon les données de la Commission économique pour l’Afrique, moins de 10 % des conseils municipaux du continent comptent des élus de moins de 35 ans. FIJADA veut inverser cette statistique d’ici cinq ans.
Un réseau de mentors pour catalyser l’innovation
Jonathan Masuta insiste sur la force du mentorat intergénérationnel. « Nos aînés ont négocié les indépendances ; nous devons négocier la transition numérique et écologique », explique-t-il, citant l’ingénieur congolais Jean-Félix Mombouli comme modèle. Le programme prévoit cent duos mentor-jeune dès 2026.
Chaque duo aura pour mission d’élaborer un microprojet aligné sur les objectifs de développement durable. Un comité ad hoc, réunissant universitaires et entrepreneurs, en validera la faisabilité avant un accompagnement financier pouvant atteindre cinq mille dollars, grâce à un fonds mobilisé auprès de partenaires publics et privés.
Pour les jeunes Brazzavillois présents, la perspective sonne concrète. Sandrine Obali, étudiante en génie civil, y voit « une rampe de lancement pour créer des éco-matériaux à base de résidus de canne à sucre ». Elle estime qu’un encadrement régulier renforcera crédibilité et accès au crédit bancaire.
Mobilité, diplomatie et Agenda 2063
Les débats ont ensuite glissé vers la libre circulation des jeunes Africains. Obtenir un visa pour Abidjan ou Kigali reste coûteux et chronophage. Jonathan Masuta a plaidé pour des couloirs d’e-visa régionaux, citant la récente initiative de la Communauté d’Afrique de l’Est comme exemple inspirant.
À la question de la différence entre diplomatie et coopération, l’ancien député Ebina a souligné que la diplomatie relève de l’État alors que la coopération découle de partenariats horizontaux. « La jeunesse doit maîtriser ces nuances pour mieux défendre ses projets auprès des bailleurs et des chancelleries », a-t-il expliqué.
Le fil rouge reste l’Agenda 2063 de l’Union africaine, dont le premier verrou repose sur la paix et la sécurité. Les participants ont salué les efforts réalisés au Congo-Brazzaville pour maintenir la stabilité, condition sine qua non d’un capital-risque attractif et d’un essor entrepreneurial durable.
Perspectives pour la prochaine étape
En fin de soirée, l’annonce d’une prochaine table-ronde à Brazzaville a déchaîné des applaudissements nourris. La capitale congolaise, cœur culturel vibrant, offrirait une tribune idéale pour présenter des prototypes issus du programme de mentorat et mesurer l’impact réel des recommandations de Kinshasa.
Pour concrétiser cette ambition, FIJADA compte ouvrir un bureau permanent sur l’avenue de la Paix. Un dossier est en discussion avec les autorités locales pour obtenir un espace dans l’incubateur public Pépinière-Jeunes, initiative soutenue par le ministère de la Jeunesse et des Sports.
À l’issue de la rencontre, beaucoup de participants échangeaient leurs contacts sous la lumière des lampadaires. Signe que l’événement va au-delà des discours, plusieurs groupes WhatsApp ont été créés sur-le-champ pour suivre l’avancement des projets et préparer la probable édition brazzavilloise de 2026.
Des partenariats stratégiques en gestation
Au-delà du soutien institutionnel, FIJADA mise sur les entreprises locales de télécommunication pour financer les hackathons prévus avant la prochaine table-ronde. Des discussions avancées seraient engagées avec Congo-Telecom et Airtel afin d’offrir des data-packages aux jeunes développeurs qui travailleront sur des applications climato-intelligentes.
Le secteur bancaire n’est pas en reste. La Banque postale du Congo étudie la création d’un micro-crédit dédié aux projets issus du réseau FIJADA, avec un taux d’intérêt préférentiel et un accompagnement en gestion comptable. Les premiers contrats pilotes pourraient être signés dès le premier trimestre 2027.
Ces partenariats potentiels illustrent la dynamique de co-construction que cherche à instaurer FIJADA : l’État assure le cadre, le privé injecte des ressources, la jeunesse invente les solutions. Une trilogie que les intervenants jugent capable de transformer Brazzaville en laboratoire régional de l’économie verte.