Vers la 12e édition du Fima 2024
Du 12 au 14 septembre prochains, le quartier 418 Makayabou, au cœur de Mongo-Mpoukou dans le cinquième arrondissement de Pointe-Noire, vibrera à nouveau. Le Festival international de musique et des arts, Fima, y déroule sa douzième édition, portée par l’ONG Mb Production.
Créé par le producteur Médard Mbongo, l’événement a conquis un public fidèle grâce à une formule simple : trois nuits de concerts gratuits, des débats et un espace d’expression artistique ouvert à tous. Cette année, le thème « La musique à l’heure du numérique » dominera les échanges.
Si la pandémie avait ralenti le rythme des grands rassemblements, les organisateurs assurent que toutes les mesures sanitaires recommandées seront appliquées. « Nous voulons que la fête soit sûre et inclusive », insiste Prisca Bissila, chargée de la logistique. Des bornes de lavage et un dispositif médical seront déployés.
Fima 2024 à Mongo-Mpoukou : un ancrage local fort
Le choix récurrent de Mongo-Mpoukou ne tient pas du hasard. Ce quartier populaire, longtemps étiqueté zone industrielle, se transforme en pôle culturel grâce aux initiatives communautaires. Voir les ruelles vibrer au son des percussions favorise, selon l’anthropologue Josué Mpamou, « un sentiment d’appartenance renouvelé ».
Pour de nombreux jeunes, le festival représente bien plus qu’un divertissement. Madeleine, étudiante en comptabilité, y voit « une salle de classe à ciel ouvert ». Entre chaque concert, elle s’intéresse aux ateliers de production musicale qui dévoilent les coulisses d’un métier souvent fantasmé mais encore méconnu.
Une programmation gratuite et ultra-éclectique
L’affiche 2024 aligne les patronymes phares de la rumba, du coupé-décalé et du rap made in Congo. On y retrouvera Soukouss Stars, mais aussi le jeune Trésor Kima, révélation de TikTok. Tous partageront la même scène, évitant les créneaux parallèles qui divisent parfois le public.
La direction artistique promet une acoustique améliorée. Un nouveau système de diffusion line-array, loué à une société locale, doit offrir un son plus net, même en périphérie du site. Les ingénieurs affirment avoir mené des tests nocturnes pour ne pas dépasser les seuils sonores autorisés.
Les artistes seniors saluent également l’ouverture intergénérationnelle. « Partager l’affiche avec la relève nous oblige à rester inventifs », confie le guitariste Master Mwana. Selon lui, cette mixité scénique permet au public de comparer sans hiérarchie, à la manière d’un streaming vivant et gratuit.
Musique congolaise et révolution numérique
Le colloque prévu le 13 septembre examinera l’impact des plateformes de diffusion sur la carrière des artistes locaux. La sociologue Mireille Goma présentera des données inédites : 67 % des titres congolais les plus écoutés en ligne sont autoproduits, signe d’une mutation profonde.
Les intervenants aborderont aussi la question de la rémunération. Malgré des audiences en hausse, beaucoup peinent à franchir le seuil de rentabilité. « Le streaming ne nourrit pas encore tout le monde », admet le beat-maker Yvon Nkombo, qui milite pour de meilleurs accords de licence.
Pour répondre à ces enjeux, le Fima lancera un hackathon baptisé Digi-Zik. Des équipes de développeurs et de musiciens disposeront de vingt-quatre heures pour imaginer une application favorisant la monétisation locale. Les prototypes gagnants bénéficieront d’un accompagnement du Programme des Nations unies pour le développement.
Retombées sociales et économiques pour la jeunesse
Au-delà de la scène, l’événement génère des opportunités temporaires. L’an passé, la mairie a recensé 250 emplois saisonniers liés au montage, à la sécurité et à la vente. Cette année, le chiffre pourrait grimper, les espaces de restauration ayant doublé leur surface.
L’Institut congolais de la statistique estime que chaque franc dépensé pendant le festival se répercute 1,6 fois dans l’économie locale, notamment grâce au transport informel. Les mototaxis de Mongo-Mpoukou prévoient ainsi d’étendre leurs horaires jusqu’à l’aube pour répondre à l’affluence nocturne.
Voix d’artistes et ambitions futures
Sur la terrasse improvisée des loges, la chanteuse Inès Bokilo exprime sa confiance : « Le Fima est devenu un passage obligé. Si tu tiens la foule ici, tu peux conquérir Kinshasa ou Abidjan ». Pour elle, la gratuité crée un baromètre précieux de popularité.
Interrogé sur l’avenir, Médard Mbongo confirme travailler à une extension vers d’autres villes côtières. L’idée serait d’organiser des capsules Fima d’une soirée, comme des avant-goûts. Il assure toutefois que le cœur du projet restera à Pointe-Noire, « terre d’inspiration maritime ».
Les autorités locales voient également d’un bon œil la montée en puissance du festival. Un responsable de la Direction départementale de la culture évoque « une vitrine indéniable du talent congolais ». Selon lui, la collaboration public-privé autour du Fima sert d’exemple à d’autres initiatives.
À l’heure où de nombreux festivals d’Afrique centrale cherchent un second souffle, le Fima affiche une stabilité rare. Son modèle gratuit, adossé à des partenariats diversifiés, pourrait inspirer une nouvelle génération d’événements culturels capables d’allier accessibilité, innovation et valorisation du patrimoine.
Dernier argument en faveur du rendez-vous : l’écho numérique. L’an dernier, le mot-dièse #FimaPN a cumulé six millions d’impressions selon l’agence SocialTrack. Les organisateurs espèrent doubler ce chiffre grâce à un partenariat avec trois influenceurs suivis par les diasporas brazzavilloises présentes sur Instagram et YouTube à travers le monde entier.
