Rotary Telema et son cinquième anniversaire
Dans la moiteur d’août, la salle de banquet d’un hôtel de Brazzaville s’est couverte de bleu et d’or pour le cinquième anniversaire du Rotary Club Brazzaville Telema, mobilisation destinée à transformer l’école publique La Poudrière, nichée dans l’arrondissement de Mfilou.
Sous le slogan « Ensemble, apportons notre soutien aux bénéficiaires de nos actions », les convives ont acheté des billets, échangé des poignées de main et fait monter la jauge des dons, signe d’une génération qui préfère l’engagement concret aux déclarations de principes.
Objectif : rénover l’école La Poudrière
Le montant exact reste discret, mais les organisateurs affirment qu’il financera la réhabilitation de salles de classe, l’installation de points d’eau potable et la fourniture de kits scolaires avant la prochaine rentrée, un trio de besoins identifié par les enseignants eux-mêmes.
Créé en 2020, le club Telema a déjà refait la toiture du collège Nganga Edouard, distribué trois mille masques en pleine pandémie et lancé un potager scolaire pilote, autant d’actions qui l’ont positionné comme incubateur citoyen reconnu par les autorités locales.
À la tribune, le président du club, Gervais Dibantsa, a rappelé que « l’éducation demeure l’ascenseur social le plus fiable », insistant sur la complémentarité entre initiatives privées et politiques publiques destinées à atteindre les Objectifs de développement durable.
Présence gouvernementale et partenariats
Cette synergie s’est matérialisée par la présence de membres du gouvernement, dont Pierre Oba et Ingrid Olga Ghislaine Ebouka Babackas, qui ont salué un engagement citoyen venant renforcer les investissements déjà planifiés dans le secteur éducatif.
Dans son intervention, le ministre des Industries minières a évoqué « la nécessité de créer un bassin de compétences locales capables de valoriser nos ressources », faisant le lien entre qualité de l’école primaire et compétitivité des filières extractives de demain.
Voix des enseignants et des élèves
Pour les élèves de La Poudrière, l’enjeu est moins théorique : beaucoup étudient dans des salles sans plafonds étanches, rangent leurs cahiers dans des sacs plastiques et manquent de livres à partager, expliquent les enseignantes rencontrées quelques jours avant la soirée.
Le directeur de l’école, Guy Mavoungou, voit dans le projet « une bouffée d’oxygène » qui allégera la contribution parentale et offrira aux enfants « l’environnement digne qu’ils méritent pour apprendre à lire et compter ».
Engagement des jeunes professionnels
Au-delà de la collecte de fonds, la soirée a servi de plateforme de réseautage pour jeunes professionnels brazzavillois, séduits par la possibilité de parrainer une classe ou d’animer des ateliers de codage, signe que l’engagement peut aussi être au service de carrières nouvelles.
Selon la vice-présidente du club, une application mobile est déjà en développement pour assurer la transparence des dépenses et poster des mises à jour en temps réel, initiative saluée par plusieurs start-up locales qui y voient une vitrine de la civic-tech congolaise.
Le mouvement Rotary, présent dans plus de deux cents pays, place la jeunesse au cœur de ses programmes ; à Brazzaville, ce positionnement trouve un écho particulier auprès d’une population dont près de soixante pour cent a moins de trente-cinq ans, selon l’Institut national de la statistique.
« L’idée est de montrer que la solidarité n’est pas l’apanage des grandes fortunes », souligne la Rotarienne Chancelle Makosso, estimant que dix mille francs CFA peuvent changer la vie d’une classe si le geste est collectif et suivi dans le temps.
La dynamique d’une solidarité connectée
La prochaine étape se jouera sur le terrain : dès septembre, des bénévoles iront dresser un état des lieux technique à La Poudrière afin de prioriser les chantiers et calibrer les devis, démarche qui servira de test-pilote pour d’autres établissements périphériques.
En fin de soirée, une vente aux enchères silencieuse de tableaux d’artistes locaux a prolongé la collecte, rappelant le potentiel de l’économie créative brazzavilloise quand elle s’adosse à des causes sociales, un modèle que les organisateurs souhaitent pérenniser.
Pour l’analyste économique Michel Okemba, ces initiatives citoyennes complètent « l’effort budgétaire de l’État et ouvrent un corridor participatif », en particulier dans un contexte où les ressources publiques doivent couvrir aussi bien les routes que la santé primaire.
Rendez-vous est donc pris pour la remise officielle des premiers équipements avant la fin de l’année; d’ici là, le Rotary Telema espère convertir l’élan de générosité du gala en partenariat durable, donnant à l’école La Poudrière tous les atouts pour écrire sa renaissance.
Sur les réseaux sociaux, le hashtag #TelemaPourLaPoudrière a enregistré plus de dix mille interactions en vingt-quatre heures, selon les données de l’agence Digicom, preuve que la philanthropie digitale gagne du terrain parmi les jeunes urbains connectés au wifi public de la ville.
Si le modèle séduit, c’est aussi parce qu’il laisse entrevoir une gouvernance partagée : l’école, le club, les ministères et les donateurs recevront un rapport trimestriel commun, pratique qui pourrait inspirer d’autres partenariats public-privé dans les domaines de la culture ou du sport.