Une formation stratégique pour la qualité publique
Brazzaville a accueilli, le 4 septembre, un atelier inédit sur la démarche qualité, ouvert par le ministre du Contrôle d’État, de la Qualité du service public et de la Lutte contre les antivaleurs, Gilbert Mokoki, devant une salle dense de cadres administratifs.
La session inaugure une série de journées scientifiques prévues dans le Plan de travail annuel budgétisé 2025 du ministère, avec l’ambition d’installer durablement une culture de la qualité au cœur de l’action publique, afin d’accroître efficacité, transparence et satisfaction des usagers.
Pour le ministre, « les administrations ne peuvent plus se contenter d’être des rouages réglementaires ; elles doivent devenir des organisations apprenantes, capables d’assurer une amélioration continue », a-t-il affirmé en ouverture, appelant les participants à s’approprier la démarche.
Autour de lui, directeurs, chefs de service, agents de suivi-évaluation et référents qualité constituent désormais la première cohorte mobilisée pour bâtir un Système de management de la qualité conforme au référentiel international ISO 9001:2015.
ISO 9001:2015, mode d’emploi pour les cadres
Les deux consultants d’Owando Consulting, Ariel Ibata et Gildas Itoua, ont posé le décor en rappelant les fondements de la norme : orientation client, leadership, implication du personnel, approche processus, amélioration continue, prise de décision fondée sur des preuves et gestion des relations avec les parties intéressées.
Pendant trois jours, les participants passent de la théorie aux ateliers pratiques, cartographiant leurs processus clés, identifiant risques et opportunités, puis simulant un audit interne pour vérifier la conformité et la performance de chaque direction.
Ariel Ibata se réjouit de « l’engagement manifeste des agents congolais », soulignant qu’ »un ministère dédié à la qualité constitue un avantage comparatif précieux en Afrique centrale », tandis que son collègue insiste sur l’importance de documenter chaque procédure sans alourdir le service.
Des résultats attendus au service des citoyens
Au terme de la formation, chaque structure devra disposer d’un plan d’actions réaliste pour initier ou consolider un projet de certification, avec un calendrier, des indicateurs et un responsable clairement identifié.
La cartographie des processus servira de boussole : elle mettra en lumière la chaîne de valeur, depuis la réception d’une requête citoyenne jusqu’à la livraison du service, en passant par le contrôle, l’archivage et le retour d’expérience.
Les experts rappellent qu’une administration certifiée ISO 9001 améliore non seulement ses délais, mais réduit ses coûts, limite les litiges et renforce la confiance du public, condition essentielle à toute politique de modernisation.
Capital humain et gestion du changement
Pour Gilbert Mokoki, le facteur humain reste la clef : « Les politiques de ressources humaines ne sont plus de simples outils d’accompagnement ; elles s’inscrivent dans une stratégie globale d’anticipation du changement », déclare-t-il, rappelant les mutations numériques et sociétales en cours.
Selon le ministre, le développement des compétences contribue à réduire les tensions professionnelles, souvent alimentées par la peur de l’inconnu ; donner du sens au changement constitue le meilleur antidote aux résistances.
Le ministère entend également instaurer des journées scientifiques régulières offrant un espace d’échange entre experts, chercheurs et praticiens, afin d’alimenter la décision publique par des données probantes et de mutualiser les retours d’expérience.
Dans cet esprit, un appel a été lancé aux « aînés » de l’administration pour parrainer la relève, sécuriser la mémoire institutionnelle et garantir la cohérence des informations diffusées à l’ensemble des services.
Vers une administration orientée performance
Au-delà de la certification, l’objectif final demeure la performance publique, entendue comme la capacité à générer des résultats tangibles pour les citoyens, tout en maîtrisant les ressources et en respectant les exigences de redevabilité.
Le ministère du Contrôle d’État prévoit d’accompagner les entités pilotes dans la mise en place de tableaux de bord numériques, permettant un suivi en temps réel des indicateurs clés de performance et une remontée rapide des dysfonctionnements.
Des partenariats sont envisagés avec les universités et les incubateurs technologiques congolais afin d’intégrer l’innovation locale dans les process, notamment l’automatisation des tâches administratives répétitives et la mise en ligne de formulaires simplifiés.
En réaffirmant que la qualité n’est pas un luxe mais un droit, Gilbert Mokoki espère voir l’administration congolaise devenir, d’ici peu, une référence régionale, capable d’offrir un service à la fois fiable, rapide et inclusif.
Perspectives et feuille de route 2025
Le calendrier d’ici à 2025 prévoit trois étapes : diagnostic organisationnel, mise en conformité documentaire et audit blanc. Chacune sera sanctionnée par un rapport public pour maintenir la pression et partager les enseignements, a indiqué la cellule projet qualité.
Un budget dédié, inscrit dans la loi de finances, couvrira la formation continue, l’acquisition d’outils logiciels et la visite d’organismes certificateurs. « La qualité représente un investissement, non une dépense », rappelle un responsable financier, estimant le retour sur investissement à moyen terme.
À l’issue de l’atelier, plusieurs participants disent avoir changé de regard sur leur métier. « Nous avons souvent les bonnes pratiques, mais pas la méthode pour les valoriser », confie une inspectrice. Le défi sera désormais de transformer ces acquis en routines quotidiennes.