Moscou célèbre 100 ans de diplomatie
Du 24 au 26 octobre, Moscou a troqué son manteau d’automne pour les habits de fête : Rossotrudnitchestvo y conviait plus de soixante délégations pour marquer le centenaire de la diplomatie russe, un anniversaire placé sous le signe de l’ouverture et du networking créatif.
Parmi la foule cosmopolite, deux visages venus de Brazzaville ont retenu l’attention. Florian Koulimaya et Émeraude Kouka, sélectionnés dans le programme « New Generation », ont porté haut les couleurs du Congo et témoigné de la vitalité d’une jeunesse décidée à compter sur la scène internationale.
Florian Koulimaya, l’ambassadeur tourisme congolais
Ancien étudiant à l’université RUDN de Moscou, Florian travaille aujourd’hui dans la société civile congolaise. Autour du panel « Comment le tourisme façonne l’image d’une ville », il a partagé une vision claire : le voyage urbain peut devenir un tremplin d’emploi pour les jeunes africains.
« Moscou m’a rappelé que le tourisme ne se limite pas aux monuments, explique-t-il. Quand une municipalité mise sur ses musées, ses cafés créatifs et ses volontaires, l’attractivité grimpe et l’employabilité suit. Nous pouvons nous en inspirer pour dynamiser Brazzaville et Pointe-Noire ».
Ses interlocuteurs ont salué la précision de ses exemples, allant des 400 musées moscovites aux maisons de la jeunesse équipées de studios pour influenceurs. « Montrer que le numérique et le tourisme marchent main dans la main ouvre un boulevard d’opportunités », souligne-t-il, déjà prêt à rédiger des passerelles concrètes.
Dans les coulisses d’une capitale jeune
Visites guidées, hackathons express et repas partagés ont rythmé l’agenda. Florian a constaté une mobilisation massive des étudiants russes comme interprètes ou guides bénévoles. Ce modèle d’engagement l’inspire : « Occuper nos jeunes par des missions valorisantes est la meilleure prévention contre le désœuvrement », décrypte-t-il.
Il imagine déjà un label « Jeunes ambassadeurs » qui permettrait aux Congolais de guider touristes, supporters sportifs ou congressistes. « Nous avons le fleuve, les marchés, la rumba. Il suffit d’une organisation agile pour transformer ces atouts en emplois pérennes », martèle-t-il, l’œil pétillant.
Émeraude Kouka et la force du soft power
Conseiller aux arts et aux lettres, Émeraude a découvert dans le forum « un laboratoire de diplomatie culturelle ». Entre deux débats, il s’initie à la calligraphie cyrillique, peint des matriochkas et mixe des blinis au caviar, autant d’expériences qui rendent la géopolitique plus humaine.
« J’ai vu une Russie chaleureuse où la ville respire et stimule la création », confie-t-il. Pour lui, le soft power passe par les rencontres informelles qui cassent les clichés. « Partager une recette ouvre parfois plus de portes qu’une heure de réunion officielle », s’amuse-t-il.
Cette immersion lui a permis d’échanger avec des jeunes de Malaisie, Laos ou Philippines. « La diversité du Sud global était visible et écoutée », se réjouit-il. Les débats se focalisaient sur les projets collaboratifs plutôt que sur les rivalités, un angle qu’il souhaite reproduire dans les forums africains.
Des ponts Sud-Sud tissés au Forum
Rossotrudnitchestvo a clairement misé sur la carte Sud-Sud. Panels, speed-meetings et séances de pitch encourageaient les coopérations hors du schéma Nord-centré. « La Russie propose des bourses, des programmes tech et culture à qui veut entreprendre », rapporte Émeraude, persuadé que le Congo peut saisir ces offres sans complexe.
Florian et lui ont commencé à lister des pistes : résidences croisées d’artistes, échanges d’influenceurs, stages en muséologie, co-organisation de festivals urbains. Objectif : faire circuler talents et idées dans les deux sens, au service d’un partenariat équilibré où chacun apprend de l’autre.
Impacts attendus pour la jeunesse congolaise
De retour à Brazzaville, les deux délégués ont animé des live Instagram pour raconter leur périple. Les réactions affluaient : « Comment postuler ? », « Quel niveau de russe faut-il ? ». Preuve que la soif d’expériences internationales grandit au sein des campus congolais.
Ils comptent transmettre les contacts engrangés aux incubateurs locaux afin de créer des accélérateurs mixtes Congo-Russie. « Si un start-uper brazzavillois obtient un mentorat moscovite, c’est gagnant-gagnant », avance Florian, convaincu que le digital écrase les distances plus vite que la diplomatie classique.
Les autorités culturelles se disent attentives. Un cadre du ministère de la Jeunesse, présent au debrief, a salué « l’énergie revigorante » rapportée de Moscou et rappelé la volonté gouvernementale de soutenir des initiatives qui lient création, formation et opportunités d’emploi.
Vers un agenda commun Brazzaville-Moscou
Prochaine étape déjà sur les rails : inviter un quatuor de jeunes animateurs russes aux Jeux de la Francophonie prévus à Brazzaville. « Nous voulons un plateau radio bilingue pour couvrir l’événement en direct », souffle Émeraude, qui voit là un moyen de booster l’audience internationale.
Un autre projet concerne la mise en réseau des musées numériques. L’idée serait de numériser des pièces majeures du Musée national congolais afin qu’elles soient visibles dans les bibliothèques interactives russes, et inversement. Une façon moderne de célébrer un patrimoine partagé sans déplacer les œuvres.
« Le dialogue interculturel n’est pas un slogan, c’est un chantier quotidien », résume Florian. Les deux ambassadeurs improvisés veulent prouver que l’amitié se nourrit de projets concrets, au bénéfice d’une jeunesse congolaise créative, mobile et décidée à s’ouvrir au monde tout en valorisant ses racines.
