Un chantier national pour l’inclusion économique
À l’heure où les indicateurs démographiques placent la République du Congo parmi les nations à forte proportion de jeunesse active, le Projet de Soutien à l’Insertion et à la Productivité des Jeunes s’impose comme une réponse structurante aux attentes d’une génération longtemps confrontée à la précarité informelle. Conçu par le gouvernement et soutenu à hauteur de 100 millions de dollars par la Banque mondiale, le PSIPJ s’appuie sur un triple axe : formation citoyenne, incubation entrepreneuriale et appui financier.
Dans un contexte macroéconomique marqué par la diversification progressive hors pétrole, l’investissement humain se révèle stratégique. « Installer durablement les jeunes dans le circuit productif, c’est consolider la résilience de l’économie nationale », rappelle un conseiller technique du ministère de l’Économie planchant sur le dossier.
Des Comités communautaires au cœur du mécanisme de ciblage
Depuis le 9 juillet, les Comités communautaires de ciblage, regroupant chefs de quartiers, représentants d’associations et notables, examinent avec minutie les listes de candidats. L’originalité du dispositif réside dans cette approche ascendante qui confère aux communautés la responsabilité première d’identifier les profils les plus vulnérables, à rebours des sélections exclusivement administratives.
« Nous tenons à préserver l’équité territoriale et sociale », insiste Florent Malonga Moussa, coordonnateur des chefs de quartiers de l’arrondissement 9 Djiri, évoquant des critères pondérés autour de la rupture scolaire, de la marginalisation ou encore de la situation de monoparentalité.
Un quota ambitieux et des chiffres qui parlent
Les projections du PSIPJ témoignent de son envergure : 20 000 bénéficiaires à Brazzaville, 14 800 à Pointe-Noire, 3 200 à Ouesso et 2 000 à Dolisie, soit 40 000 jeunes sur l’ensemble du territoire. Pour Bernicia Massimina, assistante comptable du projet, « le cadrage budgétaire a été pensé pour couvrir à la fois les modules de formation et l’amorçage financier des micro-projets ».
Chaque sélectionné pourra prétendre à un accompagnement individualisé, depuis la validation du business model jusqu’au suivi post-lancement. Le ticket d’entrée financier, variable selon la nature de l’activité, est appelé à renforcer l’autonomie et la compétitivité des micro-entreprises naissantes.
Formation citoyenne et esprit d’entreprise
Au-delà de l’injection de capitaux, le PSIPJ mise sur l’élévation des compétences dites douces. Les modules de vie civique abordent la gouvernance locale, la gestion participative des biens publics et l’écocitoyenneté, tandis que le tronc entrepreneurial traite de la comptabilité simplifiée, du marketing digital et de la négociation bancaire.
« La réussite d’un projet tient souvent moins aux chiffres qu’à la discipline et à la vision », fait valoir Victoire Ngatsongo, formatrice senior auprès d’un consortium d’ONG partenaires. Dans ses ateliers, les jeux de rôle alternent avec des retours d’expérience d’entreprises congolaises déjà florissantes, afin de décloisonner l’imaginaire économique des apprenants.
Transparence et participation, vecteurs de confiance
La publication publique des listes validées, annoncée pour la fin du mois, constitue un jalon essentiel dans la consolidation de la confiance collective. Inspiré des standards internationaux de redevabilité, le processus inclut une période de recours gracieux de sept jours durant laquelle chaque citoyen pourra formuler ses observations.
Cette dimension participative, déjà saluée par des organisations de jeunesse, répond à une exigence croissante de traçabilité des fonds de développement. Selon un sociologue de l’Université Marien-Ngouabi, « associer la microsociété à la décision finale confère aux programmes étatiques une légitimité accrue et désamorce les tensions de répartition ».
Un impact attendu sur l’écosystème entrepreneurial urbain et rural
Les analystes anticipent une stimulation de la demande locale de biens et services grâce à l’implantation simultanée de milliers de micro-structures. Dans les zones rurales, l’agro-transformation, la pisciculture et les services de proximité devraient enregistrer des avancées notables, tandis que les métropoles misent sur l’économie numérique, la logistique urbaine et les industries créatives.
À moyen terme, la densification du tissu entrepreneurial pourrait également élargir l’assiette fiscale et consolider le financement des politiques publiques, complétant ainsi la boucle vertueuse recherchée par les autorités.
Regards croisés de jeunes et d’experts
Sur le terrain, l’enthousiasme se mêle à la prudence. « Ce programme, c’est ma bouffée d’oxygène pour passer de livreur informel à patron d’une petite flotte de triporteurs », confie Giannelli, 27 ans, rencontré dans le cinquième arrondissement de Pointe-Noire. À Brazzaville, Grâce-Divine, couturière autodidacte de 24 ans, rêve déjà d’un atelier équipé de machines industrielles.
De leur côté, les économistes soulignent l’importance d’un accompagnement post-financement rigoureux. « Le risque, comme partout, reste la pérennité. Mais si le mentorat annoncé est effectif, le PSIPJ pourrait devenir une référence régionale », estime un consultant de la Banque africaine de développement.
À l’orée de cette nouvelle phase, le pari gouvernemental se lit donc dans la confiance accordée à la jeunesse. À charge désormais pour les bénéficiaires de transformer la promesse en réussite tangible, afin que l’esprit d’entreprise irrigue durablement la dynamique nationale.