Ketsia Chelsea Yoka conquiert Londres
Sur les podiums étincelants de Londres, la Congolaise Ketsia Chelsea Yoka impose désormais sa démarche fluide et son regard assuré. À seulement vingt-deux ans, la jeune femme illustre la percée du talent congolais dans un milieu mondialement compétitif.
Cette ascension n’est pas le fruit du hasard, mais celle d’un encadrement méthodique orchestré par Lena Models Academy, branche spécialisée de la plate-forme Lena fondée par Helena Kiss Moundaya. Repérée à Pointe-Noire, Yoka a bénéficié d’un suivi rigoureux.
Depuis son arrivée à Londres le 9 août, la Congolaise enchaîne castings et shootings pour des maisons européennes qui saluent sa polyvalence. Sa présence constitue une première pour une mannequin formée exclusivement sur le sol du Congo-Brazzaville.
Lena Models Academy, tremplin made in Congo
Le cœur opérationnel de cette réussite se trouve à Brazzaville, où Lena Models Academy affine poses, maintien et culture générale de dizaines d’apprentis mannequins.
Fondée en 2024, la structure est l’héritière directe de Dream’s Agency Congo, première agence lancée par Helena Kiss Moundaya en 2014 pour professionnaliser le secteur et créer des passerelles vers l’international.
« Nous ne vendons pas seulement du rêve, nous préparons des professionnelles aptes à affronter les exigences mondiales », insiste la dirigeante, souvent appelée Black Panthère pour sa détermination à faire rayonner l’élégance congolaise.
Réseaux internationaux du mannequinat
Les contrats signés avec des agences basées à Paris, Milan ou New York découlent d’un patient réseau tissé sur une décennie. Chaque signature procède d’un casting strict, garantissant aux partenaires un niveau de formation et une éthique irréprochables.
Pour Yoka, ces passerelles se traduisent déjà par une présence dans deux campagnes de prêt-à-porter britannique et un editorial pour un magazine spécialisé, preuves tangibles de l’appétence du marché pour la diversité africaine.
Les réseaux sociaux amplifient cette visibilité: en trois semaines, son audience Instagram a doublé, attirant sponsors cosmétiques et créateurs émergents désireux d’associer leur image à la sienne.
Impact jeunesse et économie congolaise
Au-delà de la success-story personnelle, l’exemple de Yoka nourrit l’espoir de nombreux jeunes du pays qui voient dans la mode un secteur viable, capable de générer des revenus et de promouvoir une image moderne du Congo.
Selon le cabinet Afritrend Consult, l’industrie africaine du mannequinat pourrait atteindre 2,3 milliards de dollars en 2028, à condition d’un encadrement solide et d’investissements dans la formation.
Pour les startups congolaises spécialisées dans les services créatifs, une telle vitrine à Londres constitue un argument concret lorsqu’elles cherchent des financements auprès de banques locales ou de fonds régionaux.
Le ministère des Petites et Moyennes Entreprises a d’ailleurs signalé, dans son dernier rapport, une hausse de 12 % des demandes de création de sociétés liées à la mode depuis janvier.
Sur le plan culturel, Yoka devient ambassadrice d’un style congolais qui embrasse tissus wax, influences urbaines et élégance épurée, participant à redéfinir les codes esthétiques africains sur les scènes occidentales.
Vers une filière mode durable au Congo
La réussite de Ketsia Chelsea Yoka pose toutefois un défi: pérenniser la dynamique au-delà d’un cas isolé.
Helena Kiss Moundaya souhaite créer, d’ici deux ans, un campus de formation à Pointe-Noire, doté d’un studio photo, d’ateliers de couture et d’un programme d’anglais professionnel pour aligner les talents sur les standards internationaux.
Des partenariats avec des écoles d’art numérique sont également envisagés afin d’intégrer la création de contenus et la gestion d’image, compétences devenues indispensables dans l’économie des influenceurs.
Pour l’instant, Yoka prévoit de revenir régulièrement au pays animer des masterclasses gratuites, convaincue que le partage d’expérience constitue le meilleur accélérateur de carrière pour ses cadettes.
« Si mon parcours peut prouver qu’il est possible d’aller loin sans renier ses racines, alors la mission est accomplie », confie-t-elle, sourire tranquille, avant de regagner un studio londonien pour une séance photo.
Les observateurs du secteur, à l’image du styliste franco-congolais Edouard Mbemba, voient dans cette percée une opportunité de renforcer les chaînes de valeur locales, du coton transformé à Ouesso jusqu’à la confection à Brazzaville.
Une étude de l’Université Marien-Ngouabi estime qu’une filière mode intégrée pourrait créer 4 000 emplois directs en cinq ans, de la logistique aux métiers numériques, si un cadre fiscal incitatif est maintenu.
Le marché intérieur représente également un vivier. Les défilés urbains organisés à Oyo, Dolisie ou Pointe-Noire attirent désormais un public prêt à investir dans des créations locales, signe d’une consommation culturelle en pleine mutation.
Pour capter cette demande, Lena Models Academy envisage de lancer une boutique en ligne regroupant tenues, accessoires et prestations de mannequins, un modèle hybride mêlant e-commerce et service, adapté aux habitudes digitales des moins de trente ans.
Dans l’immédiat, le parcours londonien de Ketsia Chelsea Yoka demeure une histoire de talent et de discipline, mais il préfigure aussi l’apparition d’un écosystème créatif où chaque victoire individuelle rayonne sur la collectivité.
L’avenir dira si cette flamme grandissante allumera durablement la scène mode congolaise.