Un nouveau format contesté
La Fédération congolaise de football a surpris de nombreux observateurs en validant, début septembre, le passage de quatorze à seize clubs pour la saison 2025-2026 du championnat national direct Ligue 1.
Réunie à Brazzaville, une coalition d’anciens dirigeants, d’arbitres et de présidents de clubs, réunis sous le nom de Collectif des membres de la Fecofoot, juge que cette mesure enfreint l’article 35 des statuts prévoyant qu’un tel changement relève exclusivement d’une assemblée générale.
Les griefs du collectif
Face aux journalistes, le porte-parole Léon Loubanda a répété que la procédure adoptée par le Comité exécutif, le Comex, « met en danger la crédibilité du championnat » puisque « les clubs n’ont pas été consultés formellement ». La lettre officielle a été adressée dès le 10 septembre au ministère des Sports.
Le document demande l’annulation pure et simple de la décision et rappelle que les deux relégations prévues fin 2024 changeraient soudainement de portée si deux clubs supplémentaires étaient promus. « C’est toute la logique sportive et financière qui basculerait », souligne un dirigeant du FC Nathalys.
Certains membres du collectif voient dans le calendrier choisi un signal politique. L’assemblée générale élective de 2026 approche et l’extension du championnat modifierait l’équilibre des votes, chaque club disposant d’une voix. « On ne veut pas d’un congrès déséquilibré d’avance », martèle Loubanda.
Enjeux électoraux en toile de fond
Aujourd’hui, le Comex est piloté par Jean-Guy Blaise Mayolas, réélu en 2022. Avec deux clubs supplémentaires, le nombre d’électeurs grimperait à trente-deux, rendant nécessaire, selon le collectif, « un nouveau rapport de forces que le bureau sortant veut contrôler ».
Une source interne confie que plusieurs présidents de clubs de deuxième division auraient déjà été approchés pour devenir les futurs promus, en échange d’un soutien lors de l’assemblée. Impossible de vérifier cette affirmation, mais elle alimente les discussions sur les plateaux radio de la capitale.
Les observateurs rappellent que la Fifa préconise la stabilité des formats, afin de protéger l’équité sportive et les investissements des sponsors. En 2018, le championnat angolais avait reculé face à une polémique comparable. « Les règles ne se bougent pas au gré des saisons », insiste un consultant.
Pour sa part, le Comex assure que « l’élargissement répond aux attentes des régions sous-représentées » et qu’il générera plus de matches, donc plus de recettes billetterie et droits TV. Le bureau exécutif affirme aussi avoir « consulté informellement » les clubs avant de passer au vote.
Réactions institutionnelles attendues
Le ministère chargé des Sports, sollicité par le collectif, n’a pas encore tranché. Un conseiller rappelle que « le football reste une association de droit privé » mais souligne que la tutelle peut intervenir si les statuts sont bafoués. Une réunion technique serait programmée pour la fin du mois.
En parallèle, la lettre de contestation est partie à la Fifa et à la Confédération africaine de football. Selon nos informations, la Fifa préconise d’abord la conciliation interne avant toute sanction. Une mission d’observation pourrait toutefois être dépêchée si la tension persiste au-delà d’octobre.
Le Comité national olympique et sportif congolais, régulièrement appelé en médiation sur les litiges, dit suivre le dossier « avec vigilance ». Son secrétaire général, Patrice Ndongo, explique que la priorité est de « préserver la saison actuelle pour ne pas pénaliser joueurs, diffuseurs et supporters ».
Dans les clubs, l’incertitude ralentit les recrutements pour 2024-2025. « Avant de signer un attaquant étranger, on veut savoir si la masse salariale sera étirée sur trente ou trente-deux journées », confie le trésorier de l’AS Otohô, qui espère un arbitrage rapide.
Quel impact pour les fans et les clubs ?
Sur TikTok, les hashtags #Ligue1CG et #Fecofoot cumulant déjà plus de deux millions de vues, les supporters se divisent. Certains saluent la perspective de nouveaux derbys régionaux, d’autres redoutent un niveau sportif dilué. « Qu’on règle surtout les stades avant d’ajouter des matches », ironise un abonné.
Au-delà des conversations en ligne, les présidents de clubs provinciaux espèrent que l’extension leur ouvrirait les portes de la Ligue 1, très centralisée à Brazzaville et Pointe-Noire. « Notre bassin de joueurs mérite enfin cette vitrine », plaide le coach du Club Athlétique de Dolisie.
La question financière reste toutefois majeure. Des déplacements supplémentaires, des frais d’arbitrage accrus et la nécessité de sécuriser des stades conformes à la Caf pourraient peser sur les trésoreries. Plusieurs dirigeants réclament déjà une révision à la hausse de la subvention fédérale promise en début de saison.
D’ici là, le calendrier du championnat 2024-2025 reste inchangé. Les supporters attendent la publication officielle des fixtures prévue en novembre. Si le ministère tranche avant cette date, la décision donnera le ton d’une saison décisive pour l’avenir de la Ligue 1 congolaise.
Les amoureux espèrent surtout que le dialogue primera. « Il y a assez de talent dans nos quartiers pour deux équipes de plus, mais pas assez de patience pour un nouveau conflit », résume un supporter de Mfilou, rappelant que le jeu doit rester la priorité.
