Une pluie de nominations pour le talent franco-congolais
Lorsqu’une notification est tombée sur le smartphone d’Olivier Kissita, le réalisateur franco-congolais a eu du mal à y croire. Il est nommé trois fois aux prestigieux Sotigui Awards 2025, cérémonie panafricaine prévue le 15 novembre à Ouagadougou. Le cinéma congolais applaudit déjà fier de son ambassadeur lumineux naissant.
Triple sélection signifie trois chances de décrocher le trophée suprême, le Sotigui d’or, ainsi que les prix de meilleur acteur d’Afrique centrale et du public africain. Une prouesse inédite pour celui qui, il y a dix ans, tournait encore des sketchs sur YouTube dans sa chambre d’étudiant parisien.
Le parcours d’un passionné de caméra
Né d’un père de Makoua et d’une mère guadeloupéenne, Olivier a grandi entre Sarcelles et Pointe-Noire. Après un bac cinéma, il s’inscrit en droit à la Sorbonne pour rassurer la famille, mais passe ses nuits à écrire des scénarios comiques, inspiré par Eddie Murphy et les films Nollywood.
Deux années intenses chez Acting International, puis des stages à Broadway, forgent sa discipline. Lorsqu’il revient en France, il autoproduit des webséries qui explosent sur Facebook. Le buzz attire les chaînes TV et, très vite, les plateaux de Barbershop, Cut puis Cacao s’ouvrent pour l’acteur en pleine ascension.
Sotigui Awards, vitrine du cinéma africain
Créés en l’honneur du regretté comédien burkinabè Sotigui Kouyaté, les prix célèbrent la crédibilité d’interprétation et la capacité à captiver l’action. L’édition 2025 aligne seize catégories et plus de quarante acteurs venus du continent, de la diaspora et d’industries partenaires dont Nollywood, Canal+ Afrique, et Amazon Prime Video.
Au-delà du tapis rouge, le rendez-vous propose ateliers d’écriture, master class et projections gratuites dans les quartiers de Ouagadougou. Les organisateurs veulent stimuler l’économie créative, encourager les co-productions et promouvoir de nouveaux récits panafricains capables de séduire Netflix, Canal+ et Disney tout en valorisant les cinémas nationaux émergents.
Un porte-étendard pour la culture congolaise
Dans les rues de Brazzaville, l’annonce suscite des débats passionnés dans les groupes WhatsApp. « C’est notre frère, il met la lumière sur le pays », commente un internaute. Les influenceurs relaient l’info en story, espérant répéter l’engouement provoqué par le sacre de Prince Djony en 2022 dernier.
Le ministère de la Culture salue « une reconnaissance méritée qui rejaillit sur tous les créateurs du Congo ». Plusieurs écoles de cinéma prévoient des projections spéciales de ses films, accompagnées de débats sur les occasions qu’offre aujourd’hui l’économie numérique aux jeunes réalisateurs du pays et de la diaspora.
Focus sur le thriller Frères d’ombres
Entre deux répétitions pour Ouagadougou, Kissita finalise le montage de Frères d’ombres, un long-métrage sombre racontant la jalousie fraternelle. Le héros, chômeur à bout, voit son meilleur ami lui voler le rôle de ses rêves et sombre dans une spirale obsessionnelle aux allures de tragédie grecque contemporaine urbaine.
Le réalisateur explique rechercher « un réalisme cru inspiré par les rues de Pointe-Noire et Harlem ». Le casting rassemble Faycal Acloque, Marie-Louise Compain et Laura Devoti, tandis qu’une bande originale afrobeats signée Tamsir vient électriser certaines scènes, promettant un produit calibré pour les festivals internationaux et streaming.
Engouement du public et des réseaux
Sur TikTok, le hashtag #KissitaChallenge franchit cent mille vues en une soirée. Les utilisateurs recréent la scène culte de Sexe, Love and Money où il déclare son amour devant un bus bondé. En commentaire, l’acteur répond avec des emojis saluant la créativité de la « Kissita Nation » mondiale.
En parallèle, les médias congolais en ligne publient des billets d’humeur, rappelant que les premières caméras Super-8 du pays datent des années 1960. Ils voient dans cette nomination un symbole d’endurance artistique et un encouragement pour les studios indépendants basés à Bacongo et Tié-Tié, toujours avides de reconnaissance.
Un message motivant pour la jeunesse
Invité dans une émission radio, Kissita confie : « Mon passeport porte des visas, mais mon cœur reste Brazzavillois ». Il insiste sur l’importance d’apprendre la technique, de maîtriser les nouvelles caméras et de cultiver la persévérance plutôt que d’attendre un casting miraculeux venu frapper à la porte.
Des étudiants du Centre national de cinéma projettent déjà de lui consacrer un club d’analyse de films. Leur idée : décortiquer la grammaire visuelle de l’artiste pour développer une signature congolaise reconnaissable, capable de rivaliser avec le K-Drama sud-coréen ou la Casa de Papel sur les plateformes mondiales.
Ce qui attend Kissita à Ouagadougou
Jusqu’au 15 novembre, il peaufinera son discours de remerciements, partagé entre français, lingala et créole guadeloupéen. Il répète aussi le salut traditionnel aux anciens, essentiel pour toucher le public burkinabè. Ses proches jurent qu’il emportera au moins un trophée, smartphone en main pour le live Instagram et Twitter.
Si la compétition demeure relevée, cette triple nomination suffit à inscrire son nom dans la mémoire collective. Et, quoi qu’il advienne, chaque like, chaque partage rappelle qu’un créateur du Congo peut rayonner globalement tout en restant fidèle à ses racines, valeur chère aux Sotigui et au public africain.