Brazzaville accueille ses champions éternels
Au Centre national de tennis de Brazzaville, l’ambiance est soudainement devenue vintage et électrique à la fois. Depuis le 27 novembre, des joueurs aux tempes poivre et sel dégainent encore des services lourds, prouvant que la passion n’a pas d’âge ni de rides.
La Fédération congolaise de tennis profite de cette première édition de l’Open des Vétérans pour rappeler que Brazzaville fut longtemps un carrefour régional de la petite balle jaune, et que l’expérience des aînés demeure un carburant précieux pour relancer cette tradition.
Genèse d’un tournoi pas comme les autres
À l’origine, la troisième vice-présidente Rosine Thabou Malanda, ancienne joueuse, voulait offrir à sa génération un vrai challenge. Elle a convaincu le bureau fédéral de créer une compétition réservée aux plus de 50 ans, adaptée à leur rythme.
« Nous voulions un rendez-vous à la hauteur de leur vécu sportif », explique-t-elle, souriante derrière ses lunettes de coach. L’objectif affiché est double : honorer la génération qui a défriché le tennis national et motiver la nouvelle vague à suivre cette trace.
Le concept est simple : douze joueurs, répartis en trois poules, s’affrontent d’abord en matches de classement avant des demi-finales croisées. Les inscriptions, fixées à vingt mille francs CFA, couvrent les balles neuves, l’arbitrage et un tee-shirt commémoratif collector.
Une édition masculine qui prépare l’équilibre
Pour cette première, seule la catégorie masculine est représentée. Non pas par choix définitif mais faute de candidatures féminines suffisantes avant la date limite. « Les dames seront au rendez-vous l’an prochain, nous y travaillons déjà », assure Mme Malanda, confiante.
La fédération veut profiter de l’élan pour renforcer son plan « Tennis pour toutes », lancé en partenariat avec le ministère des Sports. Des séances découvertes réservées aux femmes de plus de 40 ans seront proposées dès janvier afin d’élargir le vivier.
Transmission et inspiration intergénérationnelle
Au-delà des résultats, l’Open mise sur ce moment rare où l’on croise sur le même court une figure historique et un adolescent venu ramasser les balles. Les échanges d’astuces sur les grips ou la gestion du stress valent ici autant qu’un smash gagnant.
« Quand je les vois bouger, je me dis qu’il me reste du temps pour progresser », sourit Junior Kamba, 19 ans, volontaire service balles. Pour lui, observer la science du placement de ses aînés complète les tutoriels YouTube qu’il consomme chaque soir.
Les organisateurs ont également invité d’anciens entraîneurs nationaux à animer de courtes masterclass entre deux rencontres. Le public, constitué de familles et de clubs scolaires, peut ainsi repartir avec des conseils pratiques sur l’échauffement ou la prévention des blessures articulaires.
Format court, intensité longue durée
Chaque match se joue en deux sets de quatre jeux, super-tie-break à dix points si besoin. Le format protège les organismes tout en gardant du suspense. Les kinés estiment que cette alternance d’intensité et de récupération convient parfaitement à ces athlètes confirmés.
Le calendrier s’étale sur quatre soirées afin de permettre aux participants de concilier le tournoi avec leurs obligations. Les tribunes, gratuites, se remplissent surtout après 18 h, créneau parfait pour attirer les citadins sortant du travail.
Impacts attendus sur la scène tennistique congolaise
Selon la fédération, près de huit cents licenciés pratiquent actuellement le tennis au Congo. L’ambition est d’atteindre le millier d’ici deux ans, grâce notamment au rayonnement médiatique de l’Open des Vétérans et à la rénovation récente des courts municipaux.
Le directeur technique national, Jean-Éric Mokoko, voit dans l’événement « un laboratoire pour tester de nouvelles règles et outils digitaux avant de les déployer chez les juniors ». Il cite par exemple l’usage d’un système de suivi de balles connecté au smartphones des arbitres.
Le message santé derrière la performance
Au-delà du sport, l’Open sert de vitrine à la prévention des maladies non transmissibles, encore responsables de nombreuses hospitalisations. Un stand du ministère de la Santé distribue des brochures sur l’hypertension et propose des tests de glycémie gratuits avant chaque soirée.
« Les vétérans illustrent parfaitement le concept vie saine, activité régulière », souligne le Dr Alain Nganga, cardiologue. Son équipe espère toucher un public masculin qui consulte rarement, mais qui se laisse plus volontiers convaincre entre deux balles de match que dans un cabinet.
Fin de tournoi et perspectives
La finale aura lieu le 30 novembre sous les projecteurs, en présence d’anciens ministres des Sports et de sponsors. Au-delà du trophée, le vainqueur gagnera surtout le droit de participer à l’Open d’Afrique Centrale des Vétérans prévu l’an prochain à Libreville.
Mme Malanda envisage déjà d’étendre la formule à Pointe-Noire et Dolisie, afin de toucher la diaspora sportive de ces villes côtières. « Le tennis crée du lien social, et nos aînés en sont les meilleurs ambassadeurs », conclut-elle, raquette contre le cœur.
Reste aux jeunes de saisir la balle au bond : en tribune, plusieurs académies de Brazzaville projettent déjà d’organiser, dès décembre, des sessions communes juniors-vétérans pour capitaliser sur l’effet d’émulation. Une belle promesse pour le futur élan tennistique national.