Une enveloppe étoffée au cœur des arbitrages budgétaires
Le 8 juillet, dans la salle feutrée du ministère de l’Économie, la première session extraordinaire du comité de pilotage du Programme accélérer la gouvernance institutionnelle et les réformes pour un fonctionnement durable des services a acté une rallonge budgétaire inattendue. Fixé initialement à 3,069 milliards FCFA, le Plan de travail et budget annuel 2025 affiche désormais 3,592 milliards FCFA, soit un surcroît de 17 %. Cette réévaluation traduit, selon les experts présents, la volonté des autorités de conférer au Pagir une portée résolument stratégique dans la modernisation des finances publiques.
Face aux pressions exercées par la conjoncture internationale et les impératifs de relance interne, cette décision illustre une approche proactive. « Il ne s’agit pas d’alourdir la dépense, mais de l’orienter vers le levier réformateur », insiste un cadre du Trésor, rappelant que la finalité du programme demeure l’optimisation des ressources et la responsabilisation des administrations.
Des axes nouveaux pour un périmètre élargi
Le supplément est principalement destiné à quatre blocs d’activités : la révision de la charte d’investissement, indispensable pour attirer des capitaux dans les secteurs hors pétrole ; les travaux préparatoires du Plan national de développement 2027-2031, cadre de référence pour la prochaine décennie ; la mise à jour du manuel pays des procédures régissant les projets financés par la Banque mondiale ; et enfin le recours à un cabinet externe chargé de professionnaliser le recrutement des unités de gestion de projet.
Ces extensions sont loin d’être anecdotiques. Elles dessinent les contours d’une administration plus compétitive, adossée à des standards internationaux et dotée de mécanismes de contrôle internes renforcés. À l’heure où la Zone de libre-échange continentale africaine prend forme, la republication de la charte d’investissement revêt, par exemple, une valeur signal forte aux yeux d’investisseurs soucieux de stabilité réglementaire.
Le comité de pilotage, vigie de la performance
Présidée par le conseiller spécial du Premier ministre, M. Gervais Bouiti Viaudo, la session a contrôlé la trajectoire des indicateurs et l’état d’avancement de la passation des marchés publics. L’option du Financement lié aux résultats (PforR) retenue avec la Banque mondiale accentue la reddition de comptes : les décaissements sont corrélés à des jalons mesurables. « Notre responsabilité est de sécuriser ces jalons dans les délais », a martelé M. Bouiti Viaudo.
Cette gouvernance par les résultats constitue un changement culturel majeur, après des décennies dominées par une logique de moyens. Elle impose une discipline méthodologique que le comité entend solidifier par des audits périodiques et une communication transparente à destination des parties prenantes.
Un signal positif adressé aux partenaires techniques et financiers
Le relèvement du Ptba arrive dans un contexte de discussions soutenues avec plusieurs bailleurs, dont la Banque africaine de développement et l’Agence française de développement. En démontrant sa capacité à élargir le champ des réformes, Brazzaville renforce sa crédibilité. « Les partenaires apprécient la cohérence budgétaire et la clarté de la chaîne décisionnelle », observe un économiste du Bureau pays de la Banque mondiale.
Les précédentes évaluations ont déjà souligné la progression de la mobilisation fiscale non pétrolière, l’un des objectifs phares du Pagir. La nouvelle dotation devrait consolider ces avancées, en particulier par la digitalisation accrue des régies financières et la rationalisation des exonérations.
Diversifier l’économie : quelle résonance pour la jeunesse ?
Pour la tranche d’âge 20-35 ans, majoritaire dans la population, la question n’est pas seulement budgétaire : elle est existentielle. La révision de la charte d’investissement et la préparation du prochain Plan national de développement sont susceptibles de stimuler les filières des nouvelles technologies, de l’agro-industrie et des services créatifs, trois secteurs identifiés comme pourvoyeurs d’emplois qualifiés.
Nombre de start-uppers brazzavillois suivent donc avec attention la redéfinition des incitations fiscales et la simplification des procédures. « Un environnement d’affaires lisible est notre première demande », confie Marie-Thérèse Ndzélé, fondatrice d’une plateforme logistique. Pour ces jeunes diplômés, le Pagir peut devenir un catalyseur, à condition que les investissements publics irriguent réellement l’économie réelle.
Cap sur 2025 : défis, calendriers et responsabilités
À l’horizon de la prochaine revue des indicateurs, plusieurs jalons critiques se profilent : finalisation du draft du PND, validation des procédures actualisées et démarrage effectif des recrutements externes. Le ministère de l’Économie mise sur une coordination inter-institutionnelle sans faille pour respecter ces échéances, conscient que chaque dérapage pourrait retarder les tranches de financement.
La vigilance reste de mise, notamment dans la passation des marchés, souvent citée comme point de friction. Les autorités, épaulées par la Cellule nationale des marchés publics, entendent maintenir la cadence de transparence instaurée sous l’égide du Pagir. L’enjeu ultime est de démontrer que la rigueur budgétaire n’est pas antinomique avec la réactivité administrative, mais en constitue le socle.
Vers une maturité institutionnelle durable
Alors que la pression démographique et les attentes sociales s’intensifient, le Pagir s’affirme comme un vecteur de transformation. D’ores et déjà, les gains réalisés en matière de traçabilité des dépenses et d’exigence d’évaluation posent les jalons d’une administration plus responsable. Les 3,59 milliards FCFA validés ne sauraient être réduits à une simple ligne budgétaire : ils incarnent une ambition collective de qualité de service public et d’attractivité économique.
Le défi, reconnu par l’ensemble des parties présentes à la session, consiste désormais à inscrire ces progrès dans la durée. La poursuite d’un dialogue constructif avec la jeunesse active, les opérateurs privés et les partenaires financiers paraît essentielle. C’est à ce prix que le Congo transformera l’élan actuel en résultats tangibles, profitables aux citoyens et vecteurs de stabilité pour le pays.