Un rendez-vous diplomatique sous les ors de Paris
Sous les lambris d’une salle attenante de l’Assemblée nationale française, l’ambiance était feutrée, mais l’enjeu immense. Le 30 septembre, Firmin Édouard Matoko a été auditionné par le groupe d’amitié France-Congo, quelques jours avant le scrutin décisif pour la direction générale de l’Unesco.
Un enjeu stratégique pour Brazzaville et Paris
Cette rencontre, présidée par la vice-présidente de l’Assemblée Nadège Abomangoli, illustre le rôle croissant des diplomaties parlementaires. Elle place Brazzaville au cœur d’un jeu d’influence où Paris cherche à maintenir un dialogue privilégié avec l’Afrique centrale, tout en donnant de la visibilité à un candidat qu’elle estime crédible.
Matoko, itinéraire d’un homme de l’intérieur
Natif de Pointe-Noire, Matoko connaît parfaitement l’institution onusienne. Directeur général adjoint chargé des priorités globales Afrique et relations extérieures, il cultive la réputation d’un technocrate ponte des affaires multilatérales. Ses trente ans de carrière confèrent à sa candidature l’aura d’un fin connaisseur des rouages internes.
Un cercle restreint pour une audition ciblée
Autour de la table, on retrouvait Bruno Fuchs, président de la Commission des Affaires étrangères, Henri Ossebi, ambassadeur congolais auprès de l’Unesco, et plusieurs députés intéressés. Le huis clos a permis des échanges directs, loin des caméras, afin de tester la solidité des propositions du prétendant.
Transformer « la machine » selon Matoko
Dans son propos liminaire, Matoko a martelé vouloir « transformer la machine de l’intérieur », misant sur une gouvernance plus agile, une décentralisation des programmes vers les bureaux régionaux et un renforcement de l’inclusion numérique pour les jeunes Africains, une priorité saluée par ses interlocuteurs.
Éducation, culture, science : les trois piliers revisités
Le candidat a promis de revitaliser l’éducation de base via des partenariats public-privé, de protéger le patrimoine contre le trafic illicite en renforçant les réseaux d’experts locaux, et de doper la recherche scientifique verte, notamment l’hydrogène et l’agroforesterie, secteur clé pour le Bassin du Congo.
Le poids des soutiens parlementaires français
À écouter Nadège Abomangoli, l’audition a créé « un dialogue constructif » susceptible de se traduire par des relais auprès d’autres capitales. Les députés français, souvent influents dans leurs groupes politiques européens, peuvent aborder discrètement les délégations qui voteront au Conseil exécutif.
Brazzaville mobilise sa diplomatie culturelle
Depuis juillet, le ministère congolais des Affaires étrangères a multiplié les notes verbales pour promouvoir Matoko. Des rencontres bilatérales ont eu lieu en marge des conférences africaines de l’Unesco, preuve d’une stratégie concertée et assumée au plus haut niveau de l’État.
Un calendrier serré avant le 6 octobre
Le Conseil exécutif se réunira au siège parisien de l’Unesco pour sélectionner le lauréat qui sera ensuite entériné par la Conférence générale. Matoko, confiant, prévoit encore des consultations de couloir et des tribunes médiatiques afin de convaincre les hésitants dans la ligne droite finale.
L’échiquier des adversaires
Face au Congolais, plusieurs candidats issus d’Asie, d’Europe et d’Amérique latine défendent des visions souvent concurrentes sur la gouvernance et le rôle géopolitique de l’Organisation. Observateurs et diplomates reconnaissent toutefois à Matoko un avantage : la connaissance intime des priorités africaines, région encore sous-représentée à la tête de l’Unesco.
Une audition marquée par la cordialité
Des témoins rapportent des échanges « sans langue de bois ». Bruno Fuchs a interrogé Matoko sur la neutralité politique de l’Organisation face aux crises. Le candidat a répondu qu’il privilégierait « l’expertise avant le positionnement » afin d’éviter les blocages politisés qui freinent trop souvent les programmes.
Le soft power congolais en action
Au-delà de la compétition, la candidature symbolise l’ambition d’un Congo qui souhaite mettre en avant ses atouts culturels et universitaires. Des initiatives telles que le Festival panafricain de musique ou le projet d’université numérique régionale sont brandies comme preuves d’un engagement concret.
Jeunesse et genre au cœur du programme
Matoko promet une Unesco plus accessible aux moins de 35 ans grâce à des incubateurs créatifs et des bourses de recherche ciblées. Il défend également la parité dans les directions régionales, affirmant que « l’efficacité sera proportionnelle à la diversité des décideurs ».
Brazzaville applaudit déjà
Sur les réseaux sociaux congolais, les hashtags #TeamMatoko et #CongoForUnesco se multiplient. Des étudiants de l’université Marien-Ngouabi relayent des vidéos expliquant les compétences du candidat. Cette mobilisation numérique, spontanée ou encouragée, vise à maintenir la pression positive jusqu’au vote.
Paris joue la carte de la continuité Afrique
En soutenant un haut fonctionnaire originaire du continent, certains élus français souhaitent montrer que l’Hexagone reste attentif aux aspirations africaines, sans pour autant s’immiscer ouvertement dans le scrutin. Un équilibre diplomatique délicat, mais jugé gagnant dans la conjoncture actuelle.
Perspectives pour la diplomatie Sud-Sud
Si Matoko l’emporte, le Congo pourrait apparaître comme un trait d’union entre Afrique, Europe et Amérique latine, favorisant des coalitions Sud-Sud sur l’éducation et la culture. Plusieurs capitales africaines voient déjà dans sa candidature une opportunité de renforcer le poids du continent au sein de l’Onu.
La dernière ligne droite
À quelques jours du vote, chaque entretien compte. Matoko enchaîne réunions techniques et consultations informelles. « Le multilatéral est d’abord une affaire de rencontres », glisse-t-il à la sortie, avant de rejoindre une navette direction le boulevard Garibaldi, épicentre diplomatique de l’Unesco.
Ce que les jeunes Congolais retiennent
Au-delà des salons parisiens, beaucoup y lisent un message d’ouverture : un compatriote peut viser les plus hautes fonctions internationales. Quelle que soit l’issue, l’audition du 30 septembre restera la démonstration qu’une vision congolaise de la culture et du savoir peut rayonner au-delà des frontières.