Report soudain de l’AG Fécofoot
Brazzaville, 4 octobre. Les délégués de la Fédération congolaise de football s’étaient installés dans la salle, badges autour du cou, prêts à voter rapports et budgets. Soudain, l’annonce tombe : l’assemblée générale ordinaire n’aura pas lieu, sur injonction d’une ordonnance judiciaire surprise.
Le document, signé par la doyenne des juges d’instruction du Tribunal de grande instance de Brazzaville, suspend toute délibération statutaire jusqu’à nouvel ordre. Aucune notification écrite n’était encore parvenue au siège de la Fécofoot, mais le message circulait déjà sur les réseaux sociaux.
Une salle médusée face à la décision
Face aux rangées de chaises soudain désœuvrées, le bureau exécutif a opté pour une courte déclaration afin de respecter la décision. Le secrétaire général, micro en main, a présenté des excuses aux délégués venus de tout le pays ainsi qu’au représentant de la Fifa.
« Nous sommes venus vous délivrer le message », a expliqué Carle Boniface Malalou, deuxième vice-président. « Nous avons découvert, hier après-midi, sur Internet, l’ordonnance annulant notre assemblée. Par prudence, nous préférons nous y conformer. Une nouvelle date vous sera communiquée très vite. »
La Fifa observe, Statuts en main
La Fifa était représentée par Franciny Samba, dépêchée pour observer le déroulement des travaux. Restée silencieuse, l’émissaire s’est contentée de prendre note. Son rapport, attendu à Zurich, aidera l’instance mondiale à mesurer la portée de l’intervention judiciaire congolaise dans la gouvernance du football national.
Les statuts de la Fifa rappellent que chaque association membre doit gérer ses affaires sans influence de tiers, qu’elle soit étatique ou privée. Toute ingérence peut mener à des sanctions allant jusqu’à la suspension, scénario déjà connu des supporters congolais il y a quelques années.
Conséquences sportives immédiates
Pour l’heure, la Fécofoot ne souhaite pas parler de conflit. Ses avocats étudient l’ordonnance afin d’introduire, si nécessaire, un recours. La priorité affichée reste de sécuriser le calendrier des compétitions et de rassurer clubs, joueurs, entraîneurs et partenaires économiques inquiets.
Dans les quartiers populaires de Brazzaville et Pointe-Noire, les équipes de Ligue 1 avaient déjà repris l’entraînement. Ballons neufs, maillots tout frais : la saison s’annonçait sous de bons auspices. Cette suspension inattendue ravive pourtant la crainte d’un championnat blanc, vécu en 2021.
Les présidents de club, souvent mécènes sur leurs fonds propres, redoutent de voir leurs investissements s’évaporer. « Nos joueurs sont motivés, mais ils ont besoin de compétition », confie un dirigeant de la Bouenza. Sans matches officiels, maintenir la paie et l’entraînement devient vite coûteux.
Supporters et ligues en alerte
Côté supporters, l’inquiétude se mêle à l’impatience. Les fan-clubs s’étaient mobilisés pour accueillir les rapports financiers et le bilan sportif de la sélection A, finaliste du dernier tournoi de la Cosafa. Sur WhatsApp, les captures d’écran de l’ordonnance tournent en boucle, alimentant rumeurs et débats.
Landry Louvenzo, responsable de la Ligue de Brazzaville, résume le sentiment ambiant : « La jeunesse sportive se sent abandonnée. Les équipes sont prêtes, mais sans compétitions, l’engouement retombe ». Selon lui, retarder la reprise menace l’élan populaire acquis lors des derniers matches internationaux.
Le spectre d’une suspension réapparaît
Le Congo avait déjà subi en 2014 une suspension de la Fifa pour ingérence, avant de régulariser sa situation. Les observateurs redoutent un remake, synonyme d’exclusion des compétitions africaines et d’arrêt des programmes de développement technique financés par l’instance mondiale.
Pour éviter un tel scénario, la Fécofoot multiplie les consultations. Réunis en urgence, les présidents de ligue ont réaffirmé leur attachement aux textes et à la voie légale. L’option d’un report court, validé par toutes les parties, est privilégiée afin de maintenir la saison dans les temps.
Autorités et joueurs misent sur l’apaisement
Selon une source proche du ministère en charge des Sports, les autorités suivent le dossier avec attention et souhaitent une résolution rapide, dans l’intérêt des jeunes et de l’image du pays. Aucune prise de position publique ne sera faite tant que la justice n’aura pas statué définitivement.
Du côté des joueurs, le mot d’ordre est patience. Plusieurs cadres de la sélection, en stage individuel, espèrent une issue avant la fenêtre FIFA de novembre, indispensable pour conserver leur rythme. Interrogé, le défenseur Prince Onyélo déclare : « Nous restons focus sur le travail physique ».
Entre inquiétude et espoir, les réseaux sociaux s’enflamment. Memes, vidéos de jongles et humoristes commentent le report, rappelant que le football reste le langage commun des villes et villages. Malgré la pause, les hashtags #TousDerriereLesDiables et #RepriseLigue1 continuent de truster les tendances locales.
Préparations techniques sous pression
La Fécofoot promet désormais une communication hebdomadaire pour éviter la spéculation et donner aux fans la visibilité qu’ils réclament. Si la justice valide rapidement la reprogrammation, le coup d’envoi de la saison pourra être sauvé, offrant à la jeunesse l’espace d’expression qu’elle attend.
En attendant, les entraîneurs adaptent leurs séances. Les ateliers tactiques remplacent les oppositions officielles, et le staff médical veille à maintenir la forme sans surcharger les organismes. « Un championnat décalé change toute la planification », soupire le coach de l’AS Otohô, vainqueur sortant.