La naissance d’une appli pensée à Pointe-Noire
Sous les flashs d’un hôtel du centre-ville, Duffly Boumbouet a dévoilé Somba Ndulé, plateforme de streaming développée au Congo pour le Congo. L’événement, tenu le 13 septembre, a réuni journalistes, artistes et curieux férus de technologie.
Derrière le projecteur, dix années de brainstorming, de tests et de corrections minutieuses ont sculpté cet outil présenté comme « 100 % congolais ». Objectif : offrir aux créateurs locaux un revenu régulier et aux fans une bibliothèque musicale taillée sur mesure.
Dix ans de code et de passion
Le promoteur explique avoir volontairement pris son temps afin d’obtenir un produit robuste. « Nous ne voulions pas lancer une version bêta improvisée, mais une solution stable, sécurisée et simple d’usage », confie-t-il, sourire en coin.
Ruben’s Alban, le développeur principal, souligne que le chantier a été rythmé par l’évolution des habitudes numériques. « En 2013, beaucoup téléchargeaient encore des MP3. Aujourd’hui, tout passe par le smartphone. Il fallait anticiper cette bascule et garantir une ergonomie fluide. »
Un modèle de rémunération transparent
La principale innovation se joue côté porte-monnaie des artistes. Chaque lecture génère un micro-paiement reversé mensuellement, selon des critères que la start-up promet « clairs, consultables et sans surprises ».
« Nous voulons rompre avec l’image tragique de nos icônes disparues sans droits d’auteur, insiste Boumbouet. Somba Ndulé redistribue la valeur dès le premier stream, avec des tableaux de bord consultables en temps réel. »
Abonnements abordables pour un public mobile-first
Disponible sur Play Store et APK Pure, l’application propose deux formules : un pass journalier équivalent à un ticket de bus et un forfait mensuel moins cher qu’une carte SIM, afin d’éviter l’obstacle du coût pour les jeunes utilisateurs.
La compression audio adaptative permet d’écouter en 3G sans vider le forfait data. Une fonction hors-ligne synchronise les playlists quand le réseau devient capricieux, répondant aux réalités de couverture du territoire.
Sécurité et lutte contre le piratage
Les concepteurs affichent une détermination à protéger les catalogues. Algorithmes de fingerprinting, chiffrement des fichiers et serveurs basés en Afrique centrale limitent les copies illicites, rassurant managers et producteurs.
« Nous voulons que chaque artiste dorme sur ses deux oreilles, affirme Ruben’s Alban. La musique reste notre identité ; elle mérite d’être sécurisée comme un passeport. »
Patrimoine musical et futur numérique
Du swing Lingala des années 60 au drill made in Brazza, le catalogue revendique déjà plusieurs centaines de titres numérisés en haute définition. Un partenariat avec des archives privées permettra d’ajouter des vinyles restaurés.
« Somba Ndulé n’oppose pas tradition et modernité, explique Boumbouet. Nous célébrons la rumba des aînés tout en propulsant les beats d’aujourd’hui sur la scène digitale mondiale. »
Un coup de pouce pour l’économie créative
Selon les promoteurs, la plateforme veut participer à la diversification économique nationale en valorisant l’industrie culturelle. Conçue et hébergée localement, elle génère emplois directs en développement, marketing et community management.
Les organisateurs évoquent également des partenariats à venir avec les opérateurs de téléphonie afin d’intégrer le paiement mobile, moteur clé pour capter les millions d’utilisateurs de transfert d’argent par USSD.
Fonctionnalités événementielles inédites
Au-delà de l’écoute, Somba Ndulé inclut un module agenda pour annoncer showcases, festivals et lives. Les organisateurs pourront y vendre des e-billets sécurisés par QR code, facilitant le suivi des ventes et l’accès aux salles.
Cette convergence streaming-concerts séduit déjà plusieurs bookers de Pointe-Noire. « Le public réserve sa place d’un clic pendant qu’il écoute le dernier single, c’est un cercle vertueux », analyse l’agent artistique Élodie Bemba.
Réactions enthousiastes des premiers inscrits
Le rappeur Diddy Nké, utilisateur test, se félicite de l’interface épurée. « Tout est en français simple, aucune pub intrusive, et je vois mes statistiques augmenter en temps réel. Pour nous, c’est une première au pays. »
Même satisfaction chez la chanteuse Bella Mavivi : « Enfin une plateforme qui comprend nos réalités. Le paiement en CFA et la possibilité d’uploader depuis Brazzaville nous changent la vie. »
Feuille de route des six prochains mois
Une tournée explicative dans les douze départements va démarrer. Objectif : former 500 artistes, managers et techniciens au back-office. Des ateliers seront également ouverts dans les universités pour stimuler la création de podcasts et de contenus originaux.
L’équipe prévoit un challenge TikTok afin de viraliser le hashtag #SombaDance et booster le taux d’adoption auprès des 16-24 ans, principale cible de l’application.
Regard vers l’international
La diaspora congolaise, forte de plusieurs millions de personnes, représente un marché stratégique. Grâce au paiement par carte internationale et PayPal, les mélomanes de Paris, Montréal ou Abidjan pourront soutenir leurs artistes d’origine.
« L’export de notre culture passe aussi par la tech, rappelle Boumbouet. Chaque stream depuis l’étranger, c’est du soft power pour notre pays et des devises qui rentrent. »
Soutien institutionnel et perspectives
Le projet reçoit des encouragements du ministère de la Culture, qui y voit un moyen moderne de promouvoir la création locale. Des discussions sont engagées pour intégrer Somba Ndulé aux programmes de valorisation du patrimoine musical.
Les promoteurs assurent travailler main dans la main avec les organismes de gestion collective régionaux afin de garantir une conformité totale aux standards de l’industrie.
Pourquoi le public devrait essayer
Pour l’utilisateur lambda, l’intérêt est double : accéder en un clic à la bande-son congolaise et contribuer directement au revenu des artistes. Le design coloré, inspiré des pagnes wax, ajoute une touche esthétique familière et chaleureuse.
Aucun contenu n’est géo-bloqué ; un compte suffit pour voyager du ndombolo au gospel urbain, du rap de Bacongo aux ballades de Pointe-Noire, sans frontières ni filtres.
Un pari ambitieux mais réaliste
Déjà, plus de 5 000 téléchargements ont été enregistrés la première semaine, selon les chiffres communiqués. Les créateurs visent le cap des 100 000 utilisateurs actifs avant la fin de l’année, misant sur le bouche-à-oreille et les réseaux sociaux.
Leur mantra reste simple : si chaque Congolais écoute local, l’écosystème se fortifie. Une philosophie résumée par Boumbouet : « Notre musique mérite une maison qui lui ressemble. »