Rencontre stratégique à Paris
Dans un salon lumineux du siège parisien de l’Unesco, Denis Christel Sassou Nguesso a posé, vendredi 29 septembre, les jalons d’une campagne diplomatique condensée mais ambitieuse. Le ministre de la Coopération internationale y a détaillé la feuille de route congolaise devant l’ambassadrice jordanienne Leena Al-Hadid.
L’entretien, discret mais capital, s’inscrit dans la course à la direction générale de l’organisation onusienne où Brazzaville présente la candidature de Firmin Édouard Matoko. Objectif affiché : rassembler, très tôt, un arc d’appuis traversant régions et cultures pour un vote prévu en 2025.
Vision congolaise pour l’Unesco
Devant son interlocutrice, le ministre a rappelé que l’Unesco demeure « la maison mondiale du dialogue des civilisations ». Il a exposé une vision basée sur trois axes : renforcement des programmes éducatifs en Afrique, numérisation créative du patrimoine et promotion d’un multilinguisme inclusif.
« Notre approche veut faire résonner toutes les voix, grandes et petites, au cœur d’un agenda partagé », a-t-il souligné, insistant sur la complémentarité entre savoirs traditionnels et technologies émergentes. La Jordanie, souvent pont entre Orient et Occident, est jugée incontournable pour porter ce message.
Sur le volet gouvernance, Brazzaville promet de favoriser des prises de décision plus inclusives grâce à un dialogue permanent avec la société civile et les jeunes. L’idée est de replacer le terrain au centre, afin d’éviter que les programmes Unesco ne restent de simples déclarations.
Le profil de Firmin Édouard Matoko
Ancien Sous-directeur général chargé de l’Afrique au sein de l’Unesco, Firmin Édouard Matoko connaît les couloirs de l’institution comme sa poche. Universitaire de formation, il a orchestré plusieurs initiatives continentales sur l’alphabétisation et l’entrepreneuriat culturel.
Ses partisans mettent en avant sa capacité à concilier rigueur administrative et sensibilité artistique, un atout à l’heure où l’organisation doit gérer aussi bien la restauration de sites classés que la lutte contre la désinformation en ligne.
S’il est élu, Matoko deviendrait le premier Africain francophone à la tête de l’Unesco depuis Amadou-Mahtar M’Bow (1974-1987), une perspective accueillie avec optimisme par plusieurs pays du continent qui souhaitent voir leurs priorités mieux prises en compte.
Les atouts diplomatiques du Congo
La République du Congo mise sur une tradition diplomatique faite de dialogue et de consensus. De la médiation en Centrafrique au plaidoyer pour le Bassin du Congo, le pays s’est forgé une image de partenaire fiable au sein des enceintes internationales.
« Notre capital confiance est réel », confie un conseiller ministériel rencontré à Brazzaville avant le déplacement. Selon lui, ce crédit politique se nourrit de la stabilité interne et des investissements constants dans l’éducation et la culture, deux secteurs clefs pour l’agenda Unesco.
La présence de Denis Christel Sassou Nguesso, figure dynamique de la nouvelle génération gouvernementale, illustre l’importance accordée aux partenariats public-privé. Plusieurs fondations congolaises, comme Burotop Iris ou Azur Développement, ont déjà signalé leur disponibilité à soutenir des projets labellisés Unesco.
Le gouvernement mise également sur la diaspora, forte de milliers de chercheurs et d’artistes installés entre Montréal, Paris et Abidjan. Un réseau d’ambassadeurs informels, appelé « Team 242 Unesco », s’active déjà pour relayer les messages officiels dans les médias sociaux étrangers.
Réactions régionales et internationales
Du côté de l’Union africaine, le commissaire à l’éducation, aux sciences et à la technologie a salué « une candidature de rassemblement ». Bien que prudente, l’organisation continentale voit l’élection d’un Africain comme l’occasion de renforcer la coopération Sud-Sud au sein de l’Unesco.
En Europe, plusieurs diplomates rappellent la nécessité de continuer à financer les programmes phares, notamment l’Initiative pour l’eau potable transfrontalière. Ils estiment qu’un directeur général venu d’Afrique centrale offrirait un regard neuf tout en préservant la continuité budgétaire exigée par les bailleurs.
À Amman, la presse jordanienne a salué l’échange entre Leena Al-Hadid et le ministre congolais, y voyant la preuve d’un alignement grandissant entre pays arabes et africains sur les questions éducatives et patrimoniales. Aucun engagement public cependant n’a encore été rendu officiel.
Prochaines étapes et enjeux
La campagne congolaise prévoit une série de tournées régionales d’ici décembre, avec des escales programmées à Nairobi, Brasilia et Ottawa. Chaque étape sera l’occasion de présenter la plateforme de Firmin Édouard Matoko à des groupes d’électeurs composés de diplomates, d’ONG et de chercheurs.
Experts rappellent qu’une élection réussie dépendra aussi des équilibres géopolitiques internes à l’Unesco, où l’Amérique latine, l’Asie et l’Europe alternent souvent à la présidence. Pour convaincre, Brazzaville devra démontrer sa capacité à être une voix de compromis transrégional.
En attendant, le ministre appelle la jeunesse congolaise à « porter haut ses idées ». Sur TikTok et Instagram, un hashtag #Matoko2025 commence à circuler, mélange habile de fierté nationale et d’ouverture internationale. Le pari est simple : transformer un élan citoyen en force diplomatique.