Brazzaville, cœur battant du tennis de table sous-régional
Du 27 au 29 juin 2025, les gradins fraîchement rénovés du Gymnase Henri Elendé ont résonné au son mat et saccadé des balles blanches. Pour la troisième fois en une décennie, la capitale congolaise accueillait les championnats régionaux de tennis de table de la Zone 4, confirmant son statut de hub sportif d’Afrique centrale. Le ministère des Sports, soutenu par la Fédération congolaise de tennis de table, a mis en place une logistique saluée par les délégations — des visas délivrés en quarante-huit heures aux navettes permanentes entre les hôtels de Bacongo et le gymnase. Selon un responsable du Comité d’organisation, « l’objectif était de prouver que Brazzaville peut rivaliser avec Yaoundé ou Kinshasa en matière d’événementiel sportif ». L’affluence, estimée à près de 2 500 spectateurs cumulés, a donné raison à cette ambition.
Un casting de sept nations pour une partition sans fausse note
Le Burundi, le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et la RD Congo ont aligné leurs meilleurs pongistes, certains déjà rompus aux joutes continentales. Sur les tables bleues homologuées ITTF, les échanges ont gagné en intensité à mesure que se rapprochait le week-end. Les techniciens ivoiriens sollicités comme arbitres neutres ont applaudi « une densité technique jamais atteinte depuis dix ans ». Les chiffres corroborent cette impression : dix-huit rencontres se sont achevées à la belle, signe d’un resserrement des écarts de niveau. Pour les jeunes supporters brazzavillois, voir les drapeaux voisins flotter à l’unisson a rappelé que le sport demeure un terreau fertile pour l’intégration régionale.
Le verdict du tableau final et le goût subtil de l’argent congolais
Chez les dames, la RD Congo a imposé son jeu tout en variation, reléguant le Cameroun au rang de dauphin et le Congo à la troisième marche. Côté messieurs, l’escouade camerounaise dirigée par l’ex-international Alfred Atom a pris de vitesse le collectif congolais, victorieux de la RD Congo mais stoppé aux portes de l’or. À domicile, les protégés de l’entraîneur Médard Ngollo ont néanmoins décroché deux précieuses médailles d’argent : l’une par équipes, l’autre en simple grâce à Saheed Idowu. Sur le plan comptable, le bilan reste honorable dans une Zone 4 historiquement dominée par Yaoundé et Kinshasa. La réaction élégante du public, debout pour saluer chaque point serré, a souligné la maturité sportive acquise depuis les Jeux africains de 2015.
Saheed Idowu, le boursier olympique devenu locomotive
Natif de Lagos mais naturalisé congolais, Saheed Idowu évolue la majeure partie de l’année au club de São Roque, au Portugal, grâce à une bourse olympique négociée par la Fédération. À Brazzaville, il a tenu son rang jusqu’en finale, avant de s’incliner 4 sets à 0 face au gaucher camerounais Batix Ylane, récent quart-de-finaliste des Jeux africains de Ghana 2023. « Il me manque encore un surplus de rotation en revers, je le travaille avec mon entraîneur européen », a reconnu Idowu dans les travées du gymnase. Son parcours inspire de jeunes pongistes congolais, dont plusieurs bénéficient désormais de stages au centre continental d’Accra. La direction technique voit en lui un catalyseur capable d’élever le standard national, notamment à l’approche des éliminatoires de Los Angeles 2028.
Cap sur la relève : programmes fédéraux et dynamique de clubs
Au-delà de la performance immédiate, les responsables sportifs entendent capitaliser sur l’élan populaire suscité par ces championnats. Un plan quadriennal, présenté en marge de la finale, prévoit l’implantation de quinze tables extérieures dans les universités de Brazzaville et Pointe-Noire, ainsi que la formation de vingt-cinq entraîneurs de niveau continental. Le club historique de la Mairie centrale, de son côté, annonce la création d’une section U-15 ouverte aux filles, signe d’un engagement pour la parité. Le président de la Fédération, Jean-Louis Ossebi, estime que « l’argent d’aujourd’hui préfigure l’or de demain » et rappelle que de solides performances internationales restent « un levier de rayonnement culturel et économique pour la République ».
Un horizon de défis et d’opportunités pour le ping-pong congolais
Si l’absence de médaille d’or peut sembler frustrante, elle sert aussi de catalyseur à une génération qui refuse de s’installer dans le confort. Les partenariats avec la Chine pour la fourniture de matériel, la probable venue de sparring-partners nigérians et la recherche de mécènes locaux indiquent une professionnalisation progressive de la discipline. En clôture, le ministre des Sports a souligné que « le succès ne se jauge pas seulement en métal précieux, il s’apprécie aussi à la capacité de mobilisation et à la qualité du spectacle ». Dans une atmosphère fraternelle, les délégations ont quitté Brazzaville en promettant de revenir. À l’heure où la jeunesse congolaise cherche des modèles de persévérance, le tennis de table rappelle que l’échec n’est qu’une halte sur la route du succès.
